Le palais a toujours eu une belle architecture, tu aurais pu connaitre les murs par cœur, mais non. Tu n'avais que faire de ça, bien trop jeune pour apprécier l'art. Ça ne t'as pour autant pas empêcher de lire une grand quantité de livres dans la "bibliothèque" qu'offrait ton bastion. Tu n'avais qu'à sortir de ta chambre, descendre quelques marches et parcourir des couloirs pour t'y retrouver.

Tu avais décidé de regagner ton chez toi familial durant tes deux jours de congés. Tu avais pour habitude de rester à l'Oordre puisque tu y as tes quartiers. Rendre visite à la famille est une chose importante que tu devais tenir. Même si la maitresse des lieux n'est guère enchantée de ton statut. Cela a fini par se tasser et ce qui est fait, l'est déjà.
Tu croises une jeune servante, tu discutes un peu avec elle et lui demande:


Je cherche la duchesse, savez-vous où je peux la trouver ?


Elle arque ses sourcils et affiche une mine rougissante en te répondant qu'elle l'ignore. Tu agites une main devant toi en lui souriant pour signifier que ce n'était pas grave. Elle fait une légère courbette et repart à ses tâches. Tes yeux couleurs rubis glissent alors sur la cour extérieure.
Ah ... ce terrain d'entrainement. Tu y as passé tant de moment, à tomber les fesses par terre, à pleurer parce que le bâton de bois t'avais glisser des mains, à t’énerver dans ton coin et à respirer bruyamment car tu étais fatiguée. Ton sourire s'évanouit petit à petit.
Tu switch encore semble t-il et tu te perds dans tes songes. Tu te surprends à repenser à quelques épisodes où tu as croisés le bois avec d'autres, surtout un en particulier.

Adam.

Cela fait un moment que tu ne l'as pas revu. Pour toi, cela se compte en années puisque tu déambulais rarement hors de ta chambre après le décès du duc. Peut-être l'as-tu croisé mais tu ne t'en souviens vaguement; Tu espères que non: bien que tu n'avais aucun contrôle sur tes émotions, tu ne peux t’empêcher de te prendre en pitié. De prendre en pitié la jeune fille qui venait de perdre son père et qui pleurait. Tu t'étais recroquevillée au sol en sortant de la grande salle après avoir reçu la missive concernant l'odieux crime dont il avait été victime. Tu as tant hurlé, tant pleurer. Si tu devais imaginer ton cœur, tu le verrais partiellement reconstitué avec un bout que tu ne peux trouver nul part.
Tu étais une jeune fille qui tombait souvent malade mais aussi énergique, espiègle et maladroite. Tu étais aussi très souriante et tu riais beaucoup. Puis c'est arrivé. Tu ne sortais plus, ne voulais plus manger, ni même parler. Quand on venait te rendre visite dans la chambre, ta mère et ton frère peinait à tenir une conversation avec toi. Il fallu quelques temps, des mois et bien deux ans pour recommencer à sortir. Cela t'as forgé, tu as évolué et surtout ta santé s'était amélioré. Comme si ton corps savait que tu devais maintenant grandir et te servir de ce qu'il s'était passé pour devenir une meilleure version. Alors quand tu as commencé à redevenir une humaine et non plus une coquille, tu as avaler des livres et de l'entrainement. Tu ne parlais toujours pas vraiment mais tu faisais au moins tout ça.

Tu portes ta main gauche à une mèche derrière ton oreille et commence à l'entortiller autour de ton doigt.
Tu soupire silencieusement, le regard pendu sur les mannequins d'entrainement.
Tu daignes enfin bouger pour t'avancer vers les bâtons encore présents. Pas de doute, certains s'entrainent encore ici.
Tes doigts glissent sur l'épée en bois un peu malmené par les efforts et le temps.

Tu te revois, toi plus jeune, armée de ta passion et ton insolente innocence. Ce que tu aimerais la lui voler à cette petite, ces émotions présentes bien des années avant ça. Oh douce Svea Deliorha Babel, si seulement la noirceur de ton cœur ne t’enveloppe pas sur le sombre chemin impur. Continues de nourrir les principes qui t'habites et ne te laisse pas submerger, sinon tu seras perdue.
Encore piégée dans les fantômes du passé, tu ne sens même pas la branche se poser sur ton épaule. C'est ce qui suit, qui allait te faire réagir.


Ne vous a t'on jamais dis de rester toujours sur vos gardes dame Svea ?


Ton cœur rate un battement et tu te retourne brusquement, les yeux écarquillés.
A la première syllabe, tu savais que c'était lui, qu'il était là. Le scribe de ta nation, le scribe de la duchesse, le scribe de ton cœur. Celui qui sût inscrire son visage au fond de toi. Du moins quand tu étais jeune. Tu aimerais croire, en être persuadée, que ce n'était qu'une amourette d'enfance. Mais même à cet instant, il te fait un tel effet.
Tes cils battent, non tu ne rêve pas. Ces cheveux roux et ce regard semblable à l'or. Tu ne peux t’empêcher d'avoir un large sourire et pourtant tu es déchirée entre le fait de ne pas passer pour l'enfant de l'époque et laisser ton naturel faire ce qu'il veut de ton corps. Depuis longtemps tu t'étais fait une raison sur cette attirance à sens unique. Il devait te considérer comme une petite sœur depuis ces années, que le monde est cruel.
Mais même avec tout ça, tu étais si heureuse de le voir, si tu n'étais pas gênée tu l'aurais pris dans tes bras. Mais jamais tu ne le feras, vous n'êtes pas aussi proche.

Mais tu essaies également de cacher le ressentiment qui monte le long de tes entrailles. Comme si le revoir te rappelais le douloureux souvenir de toi, après le décès du duc, qui n'était qu'une coquille vide. Pourtant, Adam ne devrait pas résonner avec cette songerie. Tu parviens à calmer ton sourire enfantin et à adopter une posture plus "femme". Ce que tu étais réellement en fin de compte.



Cela fait longtemps que nous ne nous sommes pas vu. Comment vas-tu ?

Si le mode pause existait, tu aurais répété 100 phrases différentes. Tu aurais eu le luxe de choisir laquelle correspondait le mieux et laquelle te donnerait le plus de classe.

Ce que tu aimerais qu'il te remarque.
Qu'il constate que tu vas mieux.
Qu'il observe que tu as bien mûrit.
Qu'il voit à quel point tu as changé d’état d'esprit.
Qu'il conçoit que tu es devenue une femme forte.
Qu'il regarde comment tu as changé depuis.

Car oui, cela fait longtemps que vous ne vous êtes pas vu.




Oh Adam, je suis contente de te voir. Je vais bien merci, j'espère que toi aussi. Je cherchais mère, l'aurais-tu vu ?


Aïe, coup dur pour l'adversaire.
Plus jeune, tu n’arrêtais pas de parler tel un moulin à vent pour capter son attention. Tu souhaitais qu'il te parle pendant de longues heures, tu voulais communiquer avec lui.
Mais, ce jour, tu sembles juste user d'un peu de détachement. C'est ça la maturité ? Ne pas encombrer la tête de quelqu'un avec des sottises ?
Quoi qu'il en soit, tu allais droit au but. Non pas que tu voulais l'éviter, tu n'oubliais juste pas ce pour quoi tu étais venue.
Même si au fond de toi, le jeune homme continuait de ne pas te laisser indifférente, tu voulais qu'il quitte ta tête.
Le rayer et passer à autre chose.
Et c'est ce que tu arriveras à faire, un jour.

Ah, si seulement il ne t'avais pas toujours vu comme la fillette énergique, la petite "princesse" de Babel, l'enfant rigolote et espiègle.
Si seulement, Almire ne t'avais pas volé ton premier baiser: alors tu aurais pu espérer filer le parfait amour avec le beau scribe comme dans les représentations romantiques. Mais non, peut-être dans une réalité différente, un autre thème astral. Même si ton attachement pour lui est resté le même, ta tête a déjà tiré sa révérence, ton cœur a aussi préparé son baluchon pour la rejoindre.

C'est fou, plus tu regardes ton interlocuteur, plus tu es attendrie. Mais aussi et surtout, tu as envie de lui faire "mal".
Ni physiquement, ni mentalement.
Pas une douleur,
pas le rendre triste.
Mais juste, lui faire mal sur la vision candide de la toi du passé.


Je crains que ta mère ait une chose très importante à faire. Pas plus tard qu'il y a quelques minutes, j'étais en sa compagnie selon sa demande. Je crains que ta mère ait une chose très importante à faire. Alors, elle s'est enfermée dans son bureau et ne veut pas être dérangée.


Tu imagines bien qu'elle en a des choses à faire. Tu soupires en silence; en fait cela ne t'étonne guère.
S'il y a bien une chose que tu as gardé, c'est ton impatience, seulement tu es adulte maintenant alors tu te maitrise bien plus aisément et ne t'exprime plus de manière si sauvage. Tu aimerais être à la tête de la famille, mais malgré ton aura de tête brulée, tu as aussi envie de prendre ton temps pour offrir le mieux au peuple. Et ça, tu ne t'en sens pas encore capable. Bien trop jeune et encore faible, en tout cas c'est comme ça que tu te vois.
Svea, tu es si dure avec toi.



Je suis désolé, tu as peut-être une raison urgente pour la voir ? Elle n'avait pas l'air enclin à recevoir du monde, mais si c'est toi. Je suis tellement heureux de te revoir. J'aimerais pouvoir discuter avec toi comme au bon vieux temps, mais tu as peut-être des choses bien plus importantes à faire non ?




Ne t'en fait pas, je vais la laisser un peu à ses affaires. Je ne suis pas si pressée. Je pourrais aller voir de vieux et proches amis comme mon frère ou Almire par exemple.


Un peu garce sur les bords, comme si tu venais de balayer la présence d'Adam d'un revers de main. Comme s'il n'était pas un proche, comme si c'était un nuisible. Tu ne peux pas t'en empêcher, comme si tu lui en voulais d'être ce qu'il était.
Un homme que l'on veut aimer. Un homme qui te plait.

En effet, tu connais ta génitrice et tu sauras très bien tout prendre sur tes épaules. Ses états d'âmes et son désarroi couleraient sur toi tant tu t'es endurcie. Tu croises les bars sur ta poitrine et dirige ton regard vers la bâtisse, pensive. Depuis que tu es commandante, tu as vu plus d'une fois la couleur du sang ne serait-ce qu'avec les entrainements réels ou le récent trafic humain. Ces cadavres, ces passés violés et ces yeux ébranlés.


Tu te décides à rompre la distance entre Adam et toi par un geste surprenant. Toi qui te tenait souvent à son écart, n'osant pas respirer le même air que lui tellement tu étais impressionnée par sa prestance.
Tu glisses ton avant bras sous le sien puis laisse ta main sur son bras, comme si vous alliez vous apprêter à marcher.



Je serais plus qu'honorée de faire un tour avec le scribe s'il a du temps à m'accorder. Je t'en prie, conte-moi les nouvelles. En tant que future dirigeante de nos terres, je me dois de m'informer de ce qu'il se passe.


Tu lui adresse un léger clin d’œil amusé.
Décidément, on se demande où est partie la fillette intimidée en présence du scribe.

Cela aurait pu être comme un rêve si tu avais dix ans de moins environ. Ton cœur serait alors sur le point d'explorer et tes mains serait devenues moites en la présence si proche du scribe. Mais tu sembles être différente, ou du moins ton corps est plus mature puisque il y a un petit sentiment qui t'habite. Tu es calme et détendue, ce contact physique te plait mais hors de question de réagir telle une fillette. Tu savoures cet instant et marche aux côtés d'un fidèle ami.
Tu es une personne courageuse, téméraire. Et tu aimerais un jour avouer à cet homme qu'il emplissait ta tête à longueur de journée, autrefois. Ce que tu aimerais lui dire que tu le trouvais beau comme un dieu et aussi impressionnant que la bibliothèque de Babel.

Oui, tu es quelqu'un de vaillant mais pas sur tes sentiments.

Tu tournes légèrement la tête vers Adam qui reprit la parole. La "chère commandante" ? Tu es plutôt fière d'avoir rapidement pu évoluer au sein de l'ordre. Pour toi, ce groupe est grand et est destiné à faire de belles choses.


Tu sais, depuis que le traité de paix a été signé, le peuple se sent vraiment beaucoup plus serein quant à l'avenir. Dans l'ensemble, la nouvelle a été bien accueillie et chacun se soutient comme ils peuvent face aux nombreuses blessures qu'ils ont pu subir. Nous avons organisé une immense fête pour célébrer tous ensemble la fin de cette année décisive. Dommage que nous n'ayons pas pu nous voir à ce moment-là.

Ah oui, cette fête-là.
Si tu y a mis les pieds ne serait-ce qu'une minute c'était déjà de trop. Tu n'avais rien contre les fêtes en général, tu n'avais rien contre cette paix naissante. Tu étais juste terrorisée à l'idée d'y venir sans une certaine personne partie trop tôt. Tu ne voulais pas non plus te pavaner devant tous alors que tant de vies ont volé en éclat, tu ne voulais pas perdre ton temps à festoyer alors que ton cœur lourd ne réclamait qu'une chose: te recueillir sur la tombe de ton paternel. Tu as participé à cette célébration à ta façon, auprès de ton père pour ne pas qu'il soit seul. Tu te souviens t'être agenouillée devant lui et avoir regardé sa pierre pendant de longues minutes, ou peut-être des heures. Tu lui a parlé de beaucoup de choses, tu t'es déchargé puis rechargé à son "contact".

C'est à ce moment précis que tu eus pour la première fois une pensée folle. Et si tout n'était qu'un mensonge ? Une ignoble farce ? Et si la déesse Zorya n'était pas celle que l'on pensait ? Et si la calamité était en fait celui que nous devions vénérer ? Mais à cette démence passagère, tu repris tes esprits et tenta de chasser ces pensées qui semblaient désirer te posséder.

Sera t-il possible que toi, un jour, tu te laisses envahir par ces déraisons ? Ta convoitise au trône et ton maintien dans l'ordre voleraient en éclat. Tu devais alors faire tout ce qui était en ton pouvoir pour cacher cette part d'ombre qui grandissait en ton cœur.

Le lendemain de cette cérémonie de paix, la duchesse te mit un savon, elle te confia ô combien ton absence l'avait mise dans l'embarras. Ton frère lui avait dit de ne pas s'inquiéter, elle a alors cru en lui et n'a pas déclenché une guerre pour te retrouver: ce serait son genre. Quand tu expliquas à ta mère l'endroit où tu trouvais, ses ridules d'expression ont disparu, elle ne pouvait t'en vouloir comme tu ne lui en voulais pas d'avoir été à cet évènement.


Mais ta Capitaine Arianrhod était elle aussi présente, donc elle a dû déjà t'en parler, je suppose. Pour en revenir à la nation, même si tout semble aller pour le mieux, les tensions subsistent. Des malfrats n'hésitent pas une seule seconde à piller, blesser autrui. D'autres scandent que cette paix ne pourra jamais guérir le mal qui a été fait depuis tant d'années.



C'est une personne formidable, j’apprends beaucoup avec elle. C'est une excellente mentor. Pour les tensions, je pense qu'elles seront éternelles, il n'y a ni mauvais ni bon côté. Tout dépend par quel prisme nous observons la situation. Pour exemple, j'ai choisi de ne pas venir à la célébration de la paix.


Tu y étais passée, mais rapidement tu es partie, tu avais justement eu le temps d'apercevoir une tignasse rousse. L'appel de ton défunt paternel fut plus fort ce soir-là. Tu savais déjà que tu n'allais pas profiter de ce banquet, tu n'avais pas pris la peine de te vêtir de la sublime robe que l'on t'avais préparé. Tu t'étais habillée en vêtement simple qui passait inaperçu et avait noué tes cheveux.

Adam se crispa légèrement, tu notas cet effet contre peau. Tu ouvres la bouche pour lui demander si tout allait bien mais il fut plus rapide.


Et toi alors ? N'est-ce pas trop fatigant que d'occuper le rôle de commandante ? Tu dois voir du pays dis moi.

Tu arrêtes la cadence de vos pas et desserre ton étreinte à son bras sans pour autant le quitter. C'était étrange, tu aimais ce temps passer avec lui et pourtant cette dernière question semblait aller vers une conversation stérile. Mais comment lui en vouloir ? A quoi t'attendais-tu Svea ?
Bien sur qu'il va te demander si tu vas bien et si ta nouvelle vie n'est pas trop dure ?
Si la vue du sang t'affecte ?
Si ces corps vides d'organes t'ont choqué ?
Si l'humain était tel un monstre que tu n'avais vu des rapport avec autant d’aliénation ?


Je crois que ... cela me convient. Intégrer l'ordre m'a beaucoup aidé, il m'a indiqué un nouveau but à suivre. Ce serait mentir de dire que je n'ai pas été surprise par certaines choses. C'est surtout la bêtise humaine qui me dépasse. En tant que scribe, tu dois savoir de quoi je parle.

Tu éloignes ton corps du sein afin de couper le contact physique et faire quelques pas en direction du grand arbre qui couvrait une petite cour. Tu l'as toujours vu grand, à vrai dire cet arbre est bien plus âgé que tes grands parents, alors tu l'as toujours connu ainsi. Et peu importe ce qu'il se passe autour de lui, il est toujours là, grand, fort, épais et résistant.

Tu te retourne en souriant vers le scribe, tes bras derrière ton dos. Le vent s'engouffre dans tes cheveux longs, comme s'il voulait s'y blottir.


Tu sais... mon cœur balance, Adam.

Tu te laisses quelques secondes de réflexion sans penser que ta phrase pouvait signifier autre chose. Tes yeux se baissent vers le sol, tu cherches tes mots.


Il ne sait pas s'il doit choisir la voie de la justice auprès de l'ordre. Je pourrais dédier ma vie à cette organisation, grimper les échelons et donner la direction à suivre pour le bien de tous. Mais je veux aussi accepter la succession de ma mère et devenir la prochaine duchesse de Babel.

La dernière phrase était en fait un aveu, le plus cher puisque tu n'en avais jamais parlé à personne. Ta mère sauterait sur l'occasion mais tu ne t'en sentais pas encore prête.
Au final, l'un ou l'autre amenait à un but commun: protéger les autres et rendre le monde meilleur.

Ce qu'il était agréable de confier ses pensées, son ressenti et ses imageries à quelqu'un. Qui plus est, une personne de confiance qui n'allait émettre aucun jugement et ne faire aucun commentaire désobligeant. Si tu l'avais dit à ton frère, mère serait déjà au courant. Il t'aurait poussé avec joie sur le trône et aurait filé bien loin. Quoi que ... il n'aurait plus eu aucune raison de filer puisque tu serais son parapluie sous la couronne.
Mère te traitait certainement d'idiote avec un grand sourire. Elle avait prit ta décision d'aller dans l'ordre comme une fuite du mariage et de l’héritage. Car oui, c'était l'ordre ton parapluie en ce moment. Comment marier une jeune femme pourtant en âge de procréer mais investie dans une tâche aussi importante ? Tu avais été plus maline que l'ainé de la famille en faisant croire que ce n'était pas ta priorité.


Svea... Voilà deux chemins qui s'annoncent tout aussi ardu l'un comme l'autre. Si le premier peut te permettre de pouvoir œuvrer pour la paix sous une seule et même bannière, tu resteras tout de même sous les ordres directs des dirigeants des différentes nations, je suppose. Pour le deuxième, oh oui que ta mère serait ravi de savoir cela. Tu jouirais peut-être d'une liberté différente à celle de l'Ordre des Chevaliers, mais avec de nouvelles contraintes que tu connais n'est-ce pas ?

Certes.
Il est difficile et pourtant primordial de comparer ces deux vies. L'un est un poste qui t'es légitime mais où tu te retrouveras avec des menottes aux poignets et un autre avec une vie bien plus simple mais où tu sais qu'il te manquera une certaine saveur. En fait... tu avais déjà ta réponse. Tu souris discrètement en t'en rendant compte. Tu savais ce que tu allais faire, tu savais où tu allais aller.


Quoique tu choisisses, sache que je te soutiendrais. Merci de me faire confiance et de m'en avoir parlé. Cela fait un petit moment, je suppose que tu avais l'idée de devenir la future duchesse, je me trompe ? C'est admirable en tout cas d'avoir autant d'ambition.

Il accompagne sa dernière phrase d'un  baiser sur le dos de ta main, tel un prince. Tu écarquilles les yeux, surprise. Tu te hâte de récupérer ta main. Mais pourquoi quand tu parviens à faire un pas en arrière de lui, c'est lui qui fait un pas avant ? Oh Adam... pas de ça avec moi... laisse-moi t'abandonner.
Ce qui est aussi surprenant c'est qu'il venait de tout bonnement te percer à jour.
Devenir la prochaine duchesse de Babel. Tu savais pourtant qu'il te manquait cette autorité légitime et cette connaissance. Ou bien tu te sous-estimait. Mais alors... officiellement, Adam deviendrait on scribe ?
Tu te décompose sur place face à cette pensée. Bien qu'il soit agréable, c'est le problème: condamnée à le voir toute ta vie. Bah... tu finiras bien par trouver un mari qui... non, les mariages emplis d'amour sont rare. La preuve en est avec le couple Pharaos / Borgia qui n'est plus d'actualité.
Mais tu sais que tu sauras très bien faire le caprice de trouver quelqu'un de digne que tu pourras aimer, quitte à devenir la risée du continent: hors de question de te marier avec un homme qui ne te plait pas.

Tu lèves ton index en direction de ton ami.


Pas un mot ni à mon frère, ni à la duchesse ni à personne d'autre d'ailleurs. Ce sera notre secret ! Promis ?

Tu fronces les sourcils et tend ton petit doigt à Adam, comme une enfant qui veut sceller sa promesse avec l'autre. D'ailleurs as-tu déjà fait des promesses par ce procédé ? Possible, toi tu tiens toujours tes promesses, tu savais qu'Adam allait en faire de même.


Peut-être que je te chargerais en personne de me trouver un bellâtre digne de moi.

Tu ricanes un peu, c'était une blague qui n'en était pas tellement une.

Il y eut ce petit moment gênant entre les deux jeunes gens mais qui finalement pouvait être assez drôle sous un autre angle. C'était d'ailleurs le premier moment étrange entre vous deux, par le passé, tu as toujours été gênée en le voyant alors ça ne compte pas.
Ton changement de sujet porta ses fruits puisque Adam vint à sceller son doigt au tien. Il ne le savait pas et tu n'arrivais pas à te l'avouer mais tu étais terrorisée à l'idée d'un jour prendre la succession qui te revient. Comment faire, quand, avec quoi ? Mais tu n'avais qu'à te tenir droite et sourire pour montrer le contraire. Tu es si fière.



Ah euh, je ne pense pas être le plus à même de réussir ce travail. Je n'ai jamais eu de copine, alors trouver un homme convenable pour toi, je ne sais pas si je réussirai.


Tu plaques ta main sur ta bouche, t’empêchant un fou rire mais les larmes aux yeux furent inévitables. le pauvre, allait-il t'en vouloir de rire de lui et cette situation ? Mais tu étais surprise qu'il n'eut jamais de partenaire, comme toi. Ce qui veut dire... qu'il n'a jamais embrassé personne ?
Oh Svea, tu te gifles mentalement à cette réflexion sortit de nulle part et tellement puérile. Tu relâches ta main et soupires un bon coup en essuyant tes yeux. Tu lui présente un sourire désolée, encore partagée entre le fait d'enfoncer le clou ou le ménager.
Comme si tu pouvais sentir son mal aise, tu lui réponds ceci.



Ne t'inquiète pas, je ne dirais rien non plus sur ça. Et moi non plus je n'ai jamais connu l'amour. A part un baiser qu'un m'a volé...


Tu détournes la tête en fronçant les sourcils et pensant à cette idiote mais attachante de Di Contini. Celle-là !
Ta phrase était légèrement fausse puisque tu as aimé Adam, mais tu voulais plutôt lui dire que jamais tu n'avais fréquenté quelqu'un.
Bon, c'était de l'amour d'adolescente.



Je n'aimerais pas te retenir donc si tu veux on peut se rejoindre un soir en ville ? Je pourrais voir si Almire est disponible aussi ? Vous êtes mes deux amis les plus proche.

C'était bon d'être avec un ami, même si le jeune Helvar n'appartenait pas à cette contrée mais à celle du Pharaon, il était ici chez lui. Et tu espérais qu'il s'y sente toujours ainsi. Tu savais, depuis ces années, que la région du sable ne semblait pas être sa favorite et que Babel lui convenait. Tu es si patriote, tu ne sais pas comment il est possible de ne pas avoir un semblant d'amour pour sa région d'origine. Tu aimes Babel et c'est bien pour cet amour que tu serais prête à rester figée sur un trône pour le restant de ta vie.
Adam est un garçon doux et aimant que tu as appris à connaître petit à petit mais de loin. Maintenant, tu es capable de ne plus avoir peur et de te tenir à ses cotés, parler de tout et de rien, plus posément.

Même si tu aimes ces conversations apaisantes et délicates, ton âme d'héritière aimerait aborder bien d'autres sujets. Des sujets que ta mère serait toute disposée à aborder. Il était un honte pour toi de ne pas t'être intéressée plus que ça à tes obligations, comme si tu les fuyais. Et à présent tu les réclame tel un caprice.



Tu sais, je n'avais rien de prévu, mais je m'excuse pour t'avoir retardé en voulant discuter avec toi. C'est avec plaisir que j'accepte ta proposition, puis ça fait un moment que je n'ai pas vu Almire. Tu peux m'envoyer une lettre à tout moment où venir toquer à ma porte. Toi aussi, tu es une très proche amie. Comptes-tu chercher à rencontrer ta mère même si elle ne veut pas ? Je peux t'accompagner si tu veux.


Tu lèves la tête vers lui, légèrement crispée. Te voilà embêtée de le voir s'excuser, un ami ne peut s'excuser d'avoir "abusé" du temps d'un autre. Tu regrettes aussitôt ta formulation de phrase et lui fait non de la tête en souriant. Décidément, vous êtes un peu maladroits ou alors ta toi plus mature et directive est encore nouvelle pour Adam.



Bien accompagne-moi, ce serait avec plaisir. Ma mère ne doit pas être aussi sauvage, elle prendra un temps pour nous considérer puis voudra m'emporter dans ces idéologies politiques certainement.



Ah et pour ce qui est de tout à l'heure, si tel est ton souhait, je peux me charger de te trouver quelqu'un. Même si je ne connais pas tes goûts et que je suis un piètre humain en ce qui concerne l'amour.


Tu lèves le nez pour admirer le superbe plafond orné que tu connais par cœur et prend un temps pour réfléchir. Comme si ta précédente question était sérieuse, Adam venait à se trouver une nouvelle mission.



J'aimerais avoir le luxe d'aimer ou bien d'avoir un bon partenaire. Si je devais choisir, rapidement au vu de mon âge, j'aimerais que ce soit toi qui marche à mes côtés.


Tu continues de regarder là-haut, comme si tes yeux tentaient de trouver une différence, s'il y avait une fissure pouvant fragiliser le beau palais.
Et cette fois, tu es sérieuse. Adam a toutes les qualités pour construire solide partenariat entre vous deux. Bien sur tu aimerais régner sur Babel avec le cœur accroché à un autre. Mais ce genre de relation est assez rare et la politique n'a pas de sentiment, les arrangements sont ainsi fait.
L'Helvar est un homme mûr, calme, réfléchi et c'est ce que tu aimais, admirais plutôt. Il est la douce brise et tu étais la tempête, du moins dans les actions que tu pouvais prendre.
Mais vous nourrissiez chacun l'un pour l'autre un profond respect et un attachement réel. Jamais tu n'aurais à craindre un couteau dans le dos, tu te sentais en sécurité avec lui.
Tu finis par jeter un coup d’œil sur le côté, à son intention.



Ne t'en fait pas, ce n'est pas une demande ou une obligation. Je t'exprime juste mes pensées rien de ce que tu me diras n'entachera notre amitié. Je t'aime bien trop pour ça !


Et tu lui souris tendrement, il pouvais parler sans masque avec toi et il le savait. Il n'avait pas à redouter ta réaction.
Tu étais consciente d'avoir prononcé ces 3 petits mots et ces 7 petites lettres, ce n'était pas une confession d'amour mais d'amitié. Depuis ces quelques années, après le grand déchirement, il t'était si facile d'exprimer tes sentiments.
Personne n'est infaillible.
Tout le monde peut disparaitre.

Un jour et d'un coup.

Tu savais que les négociations seraient ardues, mais la duchesse se laissera certainement charmer par tes propositions tant que tu lui promettais de lui reprendre le trône. Toi-même, tu ne savais pas si tu étais assez solide pour cet héritage, mais tu n'avais guère d'autres choix que de te lancer. Et si la chute pouvait sembler mortelle, tu devais embrasser ce destin qui t'attendais. Mais une chose te faisait davantage peur: changer. Tu voulais rester toi même mais il était indéniable que tu allais devoir t'adapter et agir comme une duchesse, comme chef de famille.
Tu allais certainement être la cible de raillerie afin que l'on teste si tu es apte à diriger, les autres pays étudieront tes faits et tes propos. Pour sûr, tu donneras du grain à moudre mais tu resteras fidèle à ce que tu es et régneras telle une Babelienne.
Tel ton père.

Promets-moi, promets-moi que tout ira bien et que tu veilleras sur moi. Peu importe ce qu'il se passe, peu importe mes choix.

Tandis qu tu aperçois la splendide et grande porte du bureau du duché, l'un de vous deux se raidit. Votre marche s'arrête, tu es ici et là et pourtant... tu ne t'es jamais autant sentie extérieure à tout ça.
Tu jettes un œil à Adam, bien trop stressé à l'idée de converser avec ta mère que de réellement réaliser le poids de tes mots.



Tu me portes autant en estime pour penser que je serais un bon choix Svea ?


Oh, ce tu aurais aimé que ce moment dur, à l'écouter prononcer ton prénom. Ce que tu aurais aimé que vos regards s'entremêlent encore; pour ne pas que tu ailles dans ce bureau. Tu savais qu'une fois à l’intérieur, rien ne serait plus pareil pour toi. La réponse tant attendue que tu allais apporter allait te précipiter vers l'acceptation, ton père le duc n'était plus et tu devais prendre sa place.



Cela me fait chaud au cœur d'entendre ça. Je ne saurais pas si je pourrais t'apporter ce que tu désires vraiment néanmoins. Je veux dire, je tiens énormément à toi et j'ai peur de te blesser par ma maladresse à ne pas savoir m'exprimer comme il faut. Saurais-je t'épauler comme il faut, sachant que je suis incapable de faire face à mon frère et l'avenir des Helvar. Oui, j'ai peur du changement... Je t'admire pour ton courage.


Lentement, face à un homme qui dévoile fragilité et tendresse, tu te laisse happer par le retour à la réalité. Tu déglutis, réalisant la pesanteur de tes allusions. As-tu été trop loin ? Tu n'osas pas bouger malgré ton irrémédiable envie de poser une main sur son bras pour le rassurer. Jamais tu n'avais osé questionner Adam sur son passé, ses inquiétudes et ses souhaits. Comment as-tu pu être aussi intéressée par sa personne mais manquer de jugeote à la fois ?



Adam...


Comment lui dire ?
De quelle manière lui faire savoir que tu te fichais de la piètre opinion qu'il avait de lui-même ? Qu'avoir peur est une forme de votre humanité ? Qu'il était bien plus que ce qu'il s'estimait être ? Que tu n'avais aucun doute sur le fait qu'il serait tendre et aimant même sans sentiments ?



à tes côtés, je me sens sereine et en sécurité. Alors oui...


Tu baisses les yeux à ton tour, te refusant d'affronter ses beaux yeux. Tu retiens un rougissement et te maudis de cet état qui aurait dû disparaitre avec le temps.
La vérité, c'est que tu me bouleverse.