Saule C. Murphy
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Le voyage est un supplice.
Ses lèvres serrées, sa main crispée sur le bord de la fenêtre et l’autre, sur son siège, sont insuffisants pour contenir les gémissements qui s’arrachent de ses lèvres. Les cahots de la calèche, malgré les efforts évidents du palefrenier et du conducteur, le balancent. Il n’a ni la force du chêne, ni la souplesse du roseau : chaque mouvement, est comme un coup de poignard. Sa colonne difforme, bien que soutenue par le corset, tente de suivre le mouvement : les vertèbres étirent, frottent, échauffent, irritent, les tendons et les muscles qui les lient. D’un coup sur la fenêtre, il demande à ce que l’on s’arrête, incapable de se lever, il se laisse légèrement basculer, en oublie sa dignité. Allongé, en partie sur le banc, heureusement qu’il n’est pas accompagné.
Les larmes qui germent au coin de ses prunelles, s’emplissent de lumière quand le soleil adresse une œillade malicieuse, par la fenêtre dévoilée. Arc-en-ciel qu’il observe du coin des pupilles, Saule, un instant, s’amuse à lever la main sans les toucher : le jour où il en atteindra l’extrémité, son rêve viendra à se réaliser. Pouffement, sans joie, franchit ses lèvres, une innocence salvatrice, un espoir, réconfortant, un peu de chaleur au sein de cette cage thoracique, si vide. Voilà, qu’il bascule comme un chat sur son dos, retient une grimace et savoure seulement, la chaleur qui l’irradie.
Les muscles se relâchent.
Dans cette boîte de bois, il se sent comme enfermé dans un cercueil. Le corps inerte, gisant dans ses vêtements élégants. Sa longue chevelure blanche, le drape d’un linceul funeste : sa tête y repose. Sous les paupières mi-closes, les yeux d’un bleu délavé presque mauve, s’égarent par la fenêtre pour contempler le ciel. Il entend le piaffement des chevaux, les murmures inquiets des serviteurs, l’on toque seulement deux fois, aucune voix. Comme si l’on craignait toujours, qu’il ne réponde pas.
Quelques secondes passent, d’un geste lent, Saule tend le bras ; sa main retombe, effleure le sol, jusqu’à ce qu’un contact freine son avancée. Ses doigts se referment sur le manche de sa canne, qu’il soulève d’un effort. Un seul coup, en réponse, pour donner l’ordre de repartir – et par la même occasion, un signe de vie. La remise en mouvement le fait se tendre, par tous les moyens, il doit se soulager, tant pis, l’étiquette, tant pis, sa fierté. Il redresse ses jambes, appuie ses pieds contre le bois de la calèche. Le dos contre les coussins normalement réservés à son fessier, il joint finalement les mains contre son ventre, les pressent contre le corset, dont la fermeté lui apporte un semblant de stabilité.
Jusqu’à ce qu’une pente soit amorcée.
Pris par surprise, Saule se sent avec horreur, glisser. D’un bienheureux réflexe, il parvient à basculer, se reçoit d’abord sur ses genoux, tout son poids, s’abat sur ses os dans un son sourd qui résonne jusqu’à ses épaules, la tête lui tourne, ses mains s’appuient maladroitement là où elles peuvent. Sa condition fait que monter un cheval est inenvisageable, une wyvern ou un pégase, est tout aussi impossible. Il n’aurait pas la force de se tenir.
Cet endroit, lui offre l’intimité suffisante pour qu’il daigne s’abandonner. Ouvrir son col, pour respirer. S’allonger à même le sol. S’y blottir. Et presque, s’y endormir. L’esprit errant, entre les douleurs d’un corps malmené et les rêves d’un esprit qui ne demande qu’à s’évader.
Trois coups puissants, contre la porte, l’arrachent de ses pensées.
Ils sont arrivés. D’un coup de pied (décidément, bien indigne de lui), le Duc manifeste son désir de tranquillité. De longues, très longues, minutes lui sont nécessaires et n’ont d’autres choix que lui être accordé. Se dresser à 4 pattes puise dans ses dernières forces, le souffle coupé par le corset, il est contraint de rapidement se tenir au banc, agenouillé, il reprend son souffle. Rassemble ses cheveux, pour les attacher. Il prend soin de récupérer un mouchoir dans sa poche, pour nettoyer son visage couvert de sueurs et larmes séchées, peut-être un peu de bave qui s’est échappé lorsqu’il a sommeillé. Suspendus à sa ceinture, un petit écrin contenant du fond de teint, des pinceaux, un simple fusain. C’est avec expérience, qu’il applique consciencieusement son maquillage.
Il rattache son col et déplisse sa tenue, tant pis pour les pans prisonniers sous ses genoux. Il ignore qu’il reste encore décoiffé du voyage, marqué par endroits, d’estafilades ou de bleus si aisés à apparaître sur sa peau blafarde. Se relever, dans cet état, n’est pas possible : alors Saule commence par basculer son poids sur le banc, s’y tenir et s’y dresser pour basculer son séant. Reprendre son souffle, ralentir, les battements précipités de son cœur, puis se pencher vers l’avant, saisir sa canne, la planter dans le sol, se lever, se lever, cet exercice si simple pour les enfants, lui, il lui faut plusieurs essais, pour finalement se redresser.
Ereinté, Saule pose sa main gantée sur la poignée, ouvre la portière, déjà, un domestique se précipite pour le soutenir. Et Saule n’a d’autres choix que se tenir à son bras. Pour descendre. Avancer d’un pas. Puis d’un autre.
Si ce n’était pas Lui, Saule aurait exigé à se reposer quelques jours dans une auberge, le temps nécessaire pour récupérer, pour effacer toutes les traces du voyage. Mais il concède à dévoiler à son ami, ce visage plus las et fatigué. La colère contenue, n’est visible de personne, bien que face à lui, il se dresse dignement. D’un geste, chasse son serviteur, pour s’appuyer sur sa canne, les mains jointes sur le pommeau. Le port droit, noble, malgré la mèche turquoise qui dessine un épi ridicule sur le sommet de son crâne, comme la trompe d’un éléphant renversée sur son crâne.
_ Bonjour, Oberon. Si l’importance de notre amitié et celle de la cause pour laquelle je me bats, n’étaient pas si hautes…
Ses narines frémissent.
_ J’aurais depuis bien longtemps envoyé cette calèche damnée à retourner aux pieds de l’Arbre Déesse, que son bois nourrisse celui de notre Arbre Nourricier, qu’elle fasse voyager d’autres âmes, sans leur infliger les souffrances qu’elle me fait traverser.
Et le regard noir qu’il adresse au pauvre véhicule, aurait de quoi glacer l’âme de n’importe quel guerrier.
Mais sa colère, finalement, reflue rapidement alors qu’il fait un pas en avant pour offrir sa paume à l’homme en face de lui.
_ Quel plaisir de te voir, mon vieil ami.
Ses lèvres serrées, sa main crispée sur le bord de la fenêtre et l’autre, sur son siège, sont insuffisants pour contenir les gémissements qui s’arrachent de ses lèvres. Les cahots de la calèche, malgré les efforts évidents du palefrenier et du conducteur, le balancent. Il n’a ni la force du chêne, ni la souplesse du roseau : chaque mouvement, est comme un coup de poignard. Sa colonne difforme, bien que soutenue par le corset, tente de suivre le mouvement : les vertèbres étirent, frottent, échauffent, irritent, les tendons et les muscles qui les lient. D’un coup sur la fenêtre, il demande à ce que l’on s’arrête, incapable de se lever, il se laisse légèrement basculer, en oublie sa dignité. Allongé, en partie sur le banc, heureusement qu’il n’est pas accompagné.
Les larmes qui germent au coin de ses prunelles, s’emplissent de lumière quand le soleil adresse une œillade malicieuse, par la fenêtre dévoilée. Arc-en-ciel qu’il observe du coin des pupilles, Saule, un instant, s’amuse à lever la main sans les toucher : le jour où il en atteindra l’extrémité, son rêve viendra à se réaliser. Pouffement, sans joie, franchit ses lèvres, une innocence salvatrice, un espoir, réconfortant, un peu de chaleur au sein de cette cage thoracique, si vide. Voilà, qu’il bascule comme un chat sur son dos, retient une grimace et savoure seulement, la chaleur qui l’irradie.
Les muscles se relâchent.
Dans cette boîte de bois, il se sent comme enfermé dans un cercueil. Le corps inerte, gisant dans ses vêtements élégants. Sa longue chevelure blanche, le drape d’un linceul funeste : sa tête y repose. Sous les paupières mi-closes, les yeux d’un bleu délavé presque mauve, s’égarent par la fenêtre pour contempler le ciel. Il entend le piaffement des chevaux, les murmures inquiets des serviteurs, l’on toque seulement deux fois, aucune voix. Comme si l’on craignait toujours, qu’il ne réponde pas.
Quelques secondes passent, d’un geste lent, Saule tend le bras ; sa main retombe, effleure le sol, jusqu’à ce qu’un contact freine son avancée. Ses doigts se referment sur le manche de sa canne, qu’il soulève d’un effort. Un seul coup, en réponse, pour donner l’ordre de repartir – et par la même occasion, un signe de vie. La remise en mouvement le fait se tendre, par tous les moyens, il doit se soulager, tant pis, l’étiquette, tant pis, sa fierté. Il redresse ses jambes, appuie ses pieds contre le bois de la calèche. Le dos contre les coussins normalement réservés à son fessier, il joint finalement les mains contre son ventre, les pressent contre le corset, dont la fermeté lui apporte un semblant de stabilité.
Jusqu’à ce qu’une pente soit amorcée.
Pris par surprise, Saule se sent avec horreur, glisser. D’un bienheureux réflexe, il parvient à basculer, se reçoit d’abord sur ses genoux, tout son poids, s’abat sur ses os dans un son sourd qui résonne jusqu’à ses épaules, la tête lui tourne, ses mains s’appuient maladroitement là où elles peuvent. Sa condition fait que monter un cheval est inenvisageable, une wyvern ou un pégase, est tout aussi impossible. Il n’aurait pas la force de se tenir.
Cet endroit, lui offre l’intimité suffisante pour qu’il daigne s’abandonner. Ouvrir son col, pour respirer. S’allonger à même le sol. S’y blottir. Et presque, s’y endormir. L’esprit errant, entre les douleurs d’un corps malmené et les rêves d’un esprit qui ne demande qu’à s’évader.
Trois coups puissants, contre la porte, l’arrachent de ses pensées.
Ils sont arrivés. D’un coup de pied (décidément, bien indigne de lui), le Duc manifeste son désir de tranquillité. De longues, très longues, minutes lui sont nécessaires et n’ont d’autres choix que lui être accordé. Se dresser à 4 pattes puise dans ses dernières forces, le souffle coupé par le corset, il est contraint de rapidement se tenir au banc, agenouillé, il reprend son souffle. Rassemble ses cheveux, pour les attacher. Il prend soin de récupérer un mouchoir dans sa poche, pour nettoyer son visage couvert de sueurs et larmes séchées, peut-être un peu de bave qui s’est échappé lorsqu’il a sommeillé. Suspendus à sa ceinture, un petit écrin contenant du fond de teint, des pinceaux, un simple fusain. C’est avec expérience, qu’il applique consciencieusement son maquillage.
Il rattache son col et déplisse sa tenue, tant pis pour les pans prisonniers sous ses genoux. Il ignore qu’il reste encore décoiffé du voyage, marqué par endroits, d’estafilades ou de bleus si aisés à apparaître sur sa peau blafarde. Se relever, dans cet état, n’est pas possible : alors Saule commence par basculer son poids sur le banc, s’y tenir et s’y dresser pour basculer son séant. Reprendre son souffle, ralentir, les battements précipités de son cœur, puis se pencher vers l’avant, saisir sa canne, la planter dans le sol, se lever, se lever, cet exercice si simple pour les enfants, lui, il lui faut plusieurs essais, pour finalement se redresser.
Ereinté, Saule pose sa main gantée sur la poignée, ouvre la portière, déjà, un domestique se précipite pour le soutenir. Et Saule n’a d’autres choix que se tenir à son bras. Pour descendre. Avancer d’un pas. Puis d’un autre.
Si ce n’était pas Lui, Saule aurait exigé à se reposer quelques jours dans une auberge, le temps nécessaire pour récupérer, pour effacer toutes les traces du voyage. Mais il concède à dévoiler à son ami, ce visage plus las et fatigué. La colère contenue, n’est visible de personne, bien que face à lui, il se dresse dignement. D’un geste, chasse son serviteur, pour s’appuyer sur sa canne, les mains jointes sur le pommeau. Le port droit, noble, malgré la mèche turquoise qui dessine un épi ridicule sur le sommet de son crâne, comme la trompe d’un éléphant renversée sur son crâne.
_ Bonjour, Oberon. Si l’importance de notre amitié et celle de la cause pour laquelle je me bats, n’étaient pas si hautes…
Ses narines frémissent.
_ J’aurais depuis bien longtemps envoyé cette calèche damnée à retourner aux pieds de l’Arbre Déesse, que son bois nourrisse celui de notre Arbre Nourricier, qu’elle fasse voyager d’autres âmes, sans leur infliger les souffrances qu’elle me fait traverser.
Et le regard noir qu’il adresse au pauvre véhicule, aurait de quoi glacer l’âme de n’importe quel guerrier.
Mais sa colère, finalement, reflue rapidement alors qu’il fait un pas en avant pour offrir sa paume à l’homme en face de lui.
_ Quel plaisir de te voir, mon vieil ami.
- Empire Nuhoko
- Partenaire : NameNiveau : LV 3 DAGUE (TEC)Citation : Tempus FinisInventaire : Potion +10PvsEXP : 0/0MVT : 4RES : 7DEF : 3MAG : 12ATQ : 8HP : 24Emploi / loisirs : Ducâge du perso : 50 ansMagie ou Emblème : lumièreLocalisation : Duché de MurphyIcone :Messages : 15Gold : 86
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