Écouter le silence

fief d'Adda

Les yeux clos, la main droite sur son ventre et l'autre sur son cœur, la belle-dame inspire profondément par la bouche avant d'expirer. Elle répète le processus une dizaine de fois, son esprit se vidant complètement d'une quelconque pensée. Il faut bien ce petit rituel pour se mettre en condition avant de monter sur l'estrade.

Eira c'est à toi.

Ses paupières s'ouvrent, dévoilant l'éclat azuré de ses iris. Un sourire ravissant se fige sur son visage, alors qu'elle se lève de son tabouret et rejoindre l'homme qui vient de parler. Aucun mot ne sort de sa bouche, il ne s'en offusque pas, car il le sait. La nordienne à la chevelure d'or a perdu la voix depuis bien longtemps... Mais si elle se retrouve sur cette grande place pour l'occasion, ce n'est pas pour user de ses dons d'oratrice inexistante. Une fois sur les lieux, Eira peut remarquer l'engouement du peuple du fief d'Adda pour la venue de la petite troupe. Son cœur manque un battement face à la foule, l'excitation grandissante la fait frémir inconsciemment. Au regard des autres, pourtant, elle semble très calme.

Les premiers coups de tambour résonnent alors et Eira sort avec une lenteur calculée, un éventail de son ample robe. L'air joué ainsi que les pas de danse du tournesol s'inspire grandement de l'Empire. Pas de grandes cabrioles, mais un début de prestation qui sait captiver la foule. Joie d'une enfant gambadant dans les couloirs de la demeure familiale, l'amour reçu d'une mère. Des émotions que la nordienne vie à deux cents pour cent à l'instant t et qui se reflète à travers son jeu.

Puis, elle fait mine de s'écrouler au sol, tête baissée comme défaite. Alors, la musique devient légèrement nostalgique l'espace de quelques secondes, le violon pour seul instrument. Personne ne vient remarquer que la demoiselle vient défaire les liens de sa robe, récupérer un bâton à la place de l'éventail et lorsque les tambours se font plus insistants et qu'elle en profite pour se relever, c'est une nouvelle tenue qui s'offre au spectateur. Une robe blanche, sans aucune broderie... Elle sautille sur quelques centimètres, légère comme une plume. Tourne, virevolte. Une personne qui a perdue beaucoup dans la vie et qui pourtant, continue d'aller de l'avant. Se battre pour une liberté, sa propre liberté.

Évidemment, lorsque sa prestation se conclut, chacun se lève pour l'applaudir. Elle leur offre un sourire gratifiant et incline son torse vers l'avant en une révérence. À présent, il est l'heure pour la troupe de signer la fin du spectacle. Ils sont une dizaine tout au plus à se positionner au centre de l'estrade et remercier le public comme il se doit. Pour Eira, c'est toujours un déchirement malgré la fatigue qui étreint son corps. Devoir dire au revoir et plier bagage. Mais elle peut se réconforter en se disant que ce n'est que le début d'une grande tournée à travers Elysia. Alors, elle quitte la scène, laissant ses collègues et amis recevoir ceux qui souhaitent discuter. Ses prunelles azur scrutent les environs avec nonchalance, sa respiration saccadée reprenant un rythme plus adéquat.

« Mademoiselle ! »

Une voix qui l'interpelle, fait pivoter sa tête en direction de la personne. Le tournesol l'écoute se présenter et vanter les talents de la demoiselle. Seul un immense sourire dévoilant sa dentition fait office de réponse, visiblement conquise d'entendre cela. À moins que ce ne soit parce que le duc d'Adda s'est présenté de lui-même. La voilà bien plus chanceuse qu'elle ne l'aurait penser, c'est le corbeau qui pouvait se réjouir pour les événements à venir. Quelques secondes après, c'est Salem qui se pointe en souhaitant clarifier un point important sur la nordienne. Son mutisme. Et si elle est habituée à ce que quelqu'un se ramène pour agir à sa place, pensant très certainement que son mutisme pouvait l'empêcher toutes interactions, c'est de l'agacement qui naissait dans son corps.

Mais le duc, lui aussi, ne paraît pas très heureux de l'intervention de l'autre. S'il garde un visage tout souriant, qui ne dit pas qu'il est en colère ? Salem déguerpit à grandes enjambées, partant à la recherche des précieux objets. Ainsi, il laisse "seules" les deux personnes pour le plus grand bonheur d'Eira. Main droite se posant sur ses fines lèvres rosées, la blonde laisse échapper un gloussement silencieux qui secoue son corps par la même occasion. Cet homme est décidément plein de fougue... Très certainement un bon duc pour son peuple et un bon membre du conseil pour Elysia. Pourtant, cela ne peut pas éloigner Eira de son objectif secret.

Elle hoche la tête afin de répondre à chacune de ses questions par la positif, puis, faisant quelques pas dans sa direction, tend sa main gauche vers lui, la paume en évidence. Peut-être va-t-il comprendre qu'il lui demande de placer sa propre main dans la sienne. Alors, la danseuse pourrait au moins "écrire" avec son doigt. Cela lui permettra de patienter le retour de Salem, qui malgré une recherche active, n'arrête pas de se faire alpaguer dans tous les sens.

Merci pour vos mots, cela me va droit au cœur. Essaie-t-elle de lui faire comprendre.

Oh oui, définitivement la chance lui sourit aujourd'hui.

Écouter le silence

fief d'Adda

Depuis que sa voix se meurt sans même franchir ses fines lèvres rosées, le monde est devenu plus terne. Incomprise par une majorité, car ils n'ont que faire à chercher à comprendre une gamine incapable d'aligner ne serait-ce qu'un seul mot. Pourtant, elle griffonne comme elle peut sur toute surface susceptible de convenir. Sur du papier, dans la neige de North Odin, dans le sable... Tant que cela rend la "communication" avec les autres plus accessible.

Puis il y a ce duc. La demoiselle à la chevelure d'or est sincèrement et étonnamment heureuse qu'enfin quelqu'un lui réponde. S'il n'a peut-être pas tout saisi de ce que le doigt cherchait à décrire sur la paume de sa main, il est clair qu'il en a compris le principal. Alors l'émotion la prend à la gorge malgré, fait briller ses prunelles azurs d'une lueur nouvelle. En tant que membre de la petite troupe, le compliment est très certainement le plus beau des cadeaux que l'on puisse lui faire.

La question de l'homme lui fait pencher la tête sur le côté, lui offrant un regard intrigué. La danse ne comprenait pas vraiment cette demande quelque peu particulière. Il ne faut même pas deux minutes pour être éclairé. Ainsi, il suffit simplement de donner une belle prestation et redonner la bonne humeur au duc d'Adda, pour que celui-ci vienne proposer de régler les frais des artistes. Pour tout avouer, la demoiselle ne sait pas si elle doit se sentir honorée par son geste ou avoir l'impression de se faire insulter. Elle ne montre rien des deux sentiments qui s'opposent dans son cerveau et hoche simplement de la tête de façon à accepter ce qui est demandé par l'homme. D'une certaine manière, Eira va pouvoir profiter davantage de sa présence afin de l'épier en toute discrétion. Elle doit garder la tête sur les épaules.

« Je peux même faire en sorte que l’on vous serve un plat de votre choix. Y a-t-il quelque chose en particulier qui vous ferait plaisir ? »

Gentil, beaucoup trop gentil pour que cela la fasse froncer légèrement les sourcils. Peut-être pense-t-il qu'elle ne peut pas s'offrir ce qu'elle souhaite réellement. Et la blonde peut lui demander la raison d'autant de bonnes intentions. Toutefois, elle garde cela pour elle et vient glisser son doigt sur sa main.

Si vous faites du sanglier rôti au miel et aux abricots par ici, cela serait un réel plaisir que d'accepter.

Comme pour accentuer ses paroles, le ventre de la danseuse se met à grommeler bruyamment, ses joues prenant la couleur d'une tomate bien mûre. Ce n'est pas tout, mais la prestation a été éprouvante et parler de nourriture lui donne bien envie de manger tout d'un coup.

Veuillez m'excuser... signe-t'elle à toute hâte avant de rajouter, plus posément. Je ne me suis pas présentée, Eira. Je vous remercie pour votre hospitalité, la troupe n'en sera que plus ravie.

Son regard azur scrute les environs, se demandant si Salem va revenir vite ou au contraire, si sa malchance légendaire va encore sévir. Le tournesol ne l'apprécie pas particulièrement, mais elle ne peut pas se résoudre à s'éloigner sans l'avoir averti.

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fief d'Adda

Un mets des plus raffiné et qui demande beaucoup de préparation en amont. Pourtant, sans une once d'hésitation, il accède à la requête du tournesol. Rien que de savoir que le plat fumant l'attendrait une fois de retour à l'auberge, ses papilles gustatives se réveillent, son estomac se met de nouveau à protester. Et alors que sa peau de porcelaine se teinte de rouge, le Duc se laisse aller à un rire franc. Eira laisse échapper un gloussement malgré l'embarras évidant. Il faut bien l'avouer, la bonne humeur du Duc d'Adda est communicative. Dans sa façon de traiter les gens, d'aborder un visage ouvert... Il n'est certainement pas surprenant que bon nombre de villageois le considère comme un grand gouverneur et ne remettent que rarement ses actions et questions.

Mais quand est-il vraiment derrière ce sourire et derrière ses yeux avenants ? La danseuse, qui jusqu'alors ressentait toujours un sentiment de malaise à cause de son handicap, se sent enfin plus sereine. Elle peut signer vite et manquer de se faire comprendre - cela ne serait ni la première fois et ni la dernière -, lui cherche tout de même à aller de l'avant, quitte à mal interpréter la chose. Alors oui, cela réchauffe le cœur de la nordienne. Est-ce que son père, sera-t-il un jour aussi bienveillant à son égard ?

# Tâche de te lier d'amitié avec le duc Yu-Seong. Mais, ne laisse pas ton cœur faiblir.

Un frisson parcourt son corps en même temps que la fatigue ne vienne lui donner la migraine. Elle se souvient des mots du bras droit des Ailes de l'Ombre, mais aussi de la menace cachée lorsqu'il a décidé de lui confier cette mission. Peut-être que pour ne pas s'attacher à cet homme qu'elle aimerait comme paternel exemplaire au fond de son cœur, le meilleur moyen et de lui ôter la vie le plus rapidement.

Salem choisit ce moment pour réapparaître en grandes enjambées. L'espace d'une seconde, ce sont des yeux bleu glacial qui se pose sur sa silhouette, avant de reprendre sa gaieté habituelle. Bien qu'il ne resta pas longtemps dans les parages, donnant ses trouvailles au duc, il avait donné l'occasion parfaite pour l'homme de vouloir la laisser seule. Comme il le pensait, le tournesol est épuisé. La représentation ne l'a pas ménagé et il est certain qu'elle savourera un bon bain ainsi qu'un bon repas. Non, ne pars pas, souhaite-t-elle crier, sans succès. Au lieu de cela, la belle vient utiliser son nouveau matériel. D'une écriture qui se veut un peu maladroite, elle lui répond.

Je comptais retrouver le chef de la troupe pour parler de la représentation qui a eu lieu et de celle à venir. Souhaitez-vous faire le trajet ensemble ?

Elle lui offre son plus beau sourire.

Le fief d'Adda est vraiment un endroit chaleureux, vous savez et je pense que votre présence aide beaucoup.

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fief d'Adda

Elle ne peut pas l'abandonner aussi tôt. Si elle ne peut pas s'en débarrasser dans l'immédiat, il lui faut apprendre à le connaître. Alors, la belle blonde converse avec lui en feignant l'innocence. Pourtant, cet homme à des yeux aiguisé en plus de faire jouer ses méninges. À moins que cela soit Eira qui ne prend pas la peine de cacher son éducation de noble. Tant qu'il ne dit rien de particulier à son égard, autant continuer à jouer la jeune danseuse talentueuse. Son sourire s'élargit davantage à la réponse du Duc, se veut sincère. Il veut faire au mieux pour ses sujets, du moins c'est ce qu'il proclame le plus posément possible. Pourquoi donc le corbeau lui confierait cette mission si sa cible est le plus pur des souverains ?

Non, pour la belle dame, il doit y avoir anguille sous roche. Pourtant, ses paroles et son regard ne semblent pas mentir. Elle veut aller trop vite, alors que cela ne fait que quelques minutes qu'ils se sont rencontrés. Répandre le bonheur voilà des mots qui sonnaient bien à son oreille... Une façon de penser qui aurait pu sauver tant de vie à commencer par la sienne. Mais elle sait son père pourri jusqu'à la moelle contrairement à celui qui lui fait face, celui qui vient s'enquérir de ses conditions au sein de la troupe. Quand bien même que la vie ne soit pas toujours facile, c'est tellement plus vivant de se mouvoir au rythme de la musique que de rester planter dans une maison froide, aux gens tout aussi froid. Car la liberté, c'est bien cette voie. Le tournesol n'a pas besoin de lui répondre, son visage exprimant toute sa reconnaissance d'être dans la troupe. Elle pointe son doigt dans sa direction pour lui retourner sa question.

Le trajet se fait sans problème, le duc la laisse s'arrêter lorsqu'elle souhaite poser sur papiers ses paroles. Mais par reconnaissance pour cet homme, Eira ne le retarde pas trop. Il doit voir son patron et elle, pouvoir se reposer. Tout deux finissent par arriver devant le chapiteau où ils retrouvent Salem. Malheureusement pour le dirigeant du fief d'Adda, le vieil homme, manque à l'appel et il lui faut attendre encore.

Mettant sa main devant sa bouche, le tournesol lâche un pouffement silencieux. La chance lui sourit, il faut croire. Elle le remercie d'un hochement de tête avant de prendre place sur un rondin de bois servant de siège. Bien évidemment que la fatigue lui pèse, mais est-elle déçue que cela la pousse à le côtoyer encore plus ? Non, bien au contraire.

Ne vous inquiétez pas, vous ne pouviez pas savoir qu'il serait ailleurs.

Elle l'invite à prendre place à ses côtés, un air de petite enfant déformant son visage.

Vous êtes gentil de faire attention à moi, je vous en remercie. Votre famille doit être ravie d'avoir un homme aussi prévenant.

Elle n'espère pas trop qu'il se livre à la blonde, bien que ses mots ne soient pas des mensonges. Il doit être très proche de sa femme et ses enfants que le tournesol les jalouses un peu.

Ne vous inquiétez pas pour moi, je me reposerais le moment voulu. Mais laissais moi vous maintenir compagnie le temps que monsieur arrive. Cela évitera des personnes un peu trop curieuses qui pourraient vous embêter.

Elle sent déjà de nombreux regards se poser sur le duo et notamment sur Yu-Seong.
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fief d'Adda

On ne peut qu'être heureux et bien traité lorsque l'on est un duc ainsi qu'un membre du conseil de Babel n'est-ce pas ? Du moins c'est l'image que se fait la dame des nobles dans son genre, car ils ont tout en un seul claquement de doigts - Si loin de la réalité le pauvre tournesol. Elle ne sait rien de sa vie privé -. Mais elle peut alors se poser la question sous un autre angle. Est-ce que son peuple est heureux et bien traité ?


Le patron aux abonnés absents, Eira s'occupe de tenir un peu plus compagnie à cet homme. Au vu du bruit de contentement qu'il laisse échapper de ses lèvres, Yu-Seong est définitivement plus heureux d'être assis qu'à marcher. Pourtant, la plus fatiguée du duo n'est-il pas la jolie fleur ? Doit-elle penser qu'il fait partie de ceux qui n'aiment pas trop se bouger physiquement, mais faire marcher ses méninges ? Un homme dangereux en somme, car bien plus sournois. Elle pose sa main sur sa bouche, son corps est secoué par un rire silencieux. La danseuse s'imagine très bien la scène de la famille du duc qui s'inquiète réellement et tente de le forcer à se reposer. D'ailleurs, la belle blonde se permet de griffonner sur le parchemin afin de donner raison à cette femme et ces enfants.

Peut-être veulent-ils vous préserver d'une trop grosse surcharge de travail ? C'est agréable d'avoir une famille aussi aimante.

Peut-être aurait-elle dû naître Adda et non, Strøm. Néanmoins, elle est fille de forgeron et rien ne pourra y changer, pas même la Déesse. Eira ne remarque pas le regard inquisiteur de l'homme à son égard quant à son écriture raffiné. Il faut avouer, qu'elle pourrait chercher à faire de son mieux pour rendre ses lettres plus affreuses. Sauf que l'on ne change pas une éducation aussi ancrée. Alors qui sait, peut-être se permettra-t-il de creuser, histoire de satisfaire sa curiosité. Elle sent ses joues commencer à chauffer lorsqu'il la complimente. Et tout aussi vite, un air glacial s'abat.

Cela était évidant pourtant, pourquoi s'en étonner ? Un duc avec la tête sur les épaules se doit d'avoir une certaine sécurité établie. Que cela soit pour lui-même, comme l'intégralité de son peuple. Mais heureusement qu'il fait une piqûre de rappel, sait-on jamais ce que décider le membre des Ailes de l'Ombre. Ce n'est décidément ni le moment et ni l'endroit pour commettre l'irréparable.

Son regard azur se pose sur cette fille qui s'approche d'eux, d'un pas timide. La nordienne pense que c'est la prestance du duc qui attire cette demoiselle, sauf que quand elle tend la fleur dans sa direction, son visage paraît presque étonné. Pour finalement se fendre d'un radieux sourire aussi éclatant que les rayons du soleil. Elle se lève et se met à genoux devant Sophia, offrant sa belle chevelure blonde pour que l'autre puisse y glisser son cadeau. Et quand la gamine s'éloigne en trottinant joyeusement, le tournesol replace sa nouvelle décoration pour que la tige passe derrière son oreille. Oh oui, elle aime que sa passion anime les âmes des autres et serait volontaire le jour où la petite Sophia se présenterait à elle dans le but de devenir une danseuse.

Mais à l'heure actuelle, c'est à Yu-Seong de poser les questions. Il s'interroge sur la raison d'Eira de s'être tournée vers cet art. Elle se met à réfléchir sur comment lui répondre sans que cela ne fasse trop à écrire sur son pauvre parchemin. La seconde d'après, la fille se relève et adresse un petit clin d'œil au duc. Elle souhaite qu'il la regarde attentivement. Et là, sans une once de musique, la nordienne s'élance.

Ses mains se posant sur ses bras, elle vient mimer le froid mordant du Domaine de North Odin, avant de passer par caractériser sa famille. Battre le fer tant qu'il est encore chaud. Son visage semble triste, pas un sourire ne l'anime. Elle se retrouve dans sa cage dorée dont il est impossible d'en sortir. Alors, elle se meurt, s'enfonce dans son mutisme. Puis, un beau jour, il y a cette troupe, cette femme. Émerveillée comme la petite Sophia, se trouvant enfin un rêve. La liberté l'attend, lui permettant enfin de voler de ses propres ailes et de parcourir ce monde.

Eira s'arrête de danser, fait une courbette à ceux qui l'applaudissent devant ce spectacle improvisé. Elle se rassoit et reprend fusain et parchemin.

Oui, une petite Sophia en quête de liberté.

Elle espère qu'il est assez sensible pour s'être laissé transporter par sa petite danse. Et maintenant, elle veut tout simplement lui retourner la question en le pointant du doigt et lui offrant un visage enfantin. Peut-être n'a-t-il jamais voulu devenir ce qu'il est maintenant. Ayant tout simplement subit la pression de ses parents et de ce nom de famille. Peut-être, que lui aussi aurait préféré faire quelques pas au rythme de la musique, de ses émotions. Pourtant, la belle-dame a bien du mal à se l'imaginer autre qu'un dirigeant.

Dans un petit coin, Salem est revenu, le regard rivé sur le duo. Il attend le bon moment pour ne pas interrompre la discussion. Ce n'est alors qu'au bout de plusieurs minutes qu'il se représente à eux.

Monsieur Adda, si vous souhaitez, le patron vous attend.

Eira veut foudroyer ce gamin du regard, visiblement furieuse de devoir voir sa proie s'éloigner. Mais elle garde son calme, souriant chaleureusement à Yu-Seong. C'est l'heure de se quitter.

Ce fut un plaisir de vous rencontrer, sincèrement. Discuter avec vous est vraiment enrichissant. Je ne m'attendais pas à un duc aussi ouvert et rayonnant.

Elle griffonne à la hâte, rêve que l'homme lui propose de se revoir dans un futur proche.