Gobelin est perché sur l’un des toits de la Cité.

Au crépuscule, sa silhouette se dessine, difforme et hideuse. Le dos courbé, les genoux repliés jusqu’à ses oreilles, la tête penchée, vers les rues qu’il observe. Ses cheveux noirs, rigoles obscures, dégoulinent de son crâne, cascadent, devant son visage. L’arrête osseuse d’un nez saillant, tranche en deux cette rivière huileuse et ébène, où se devine la peau de nacre, d’un masque mortuaire. Le faciès inerte d’un noyé, les lèvres scellées, dans ses orbites creusés, luisent ses yeux. Prunelles serpentines, d’un vert froid rendu visqueux, par l’humidité des muqueuses. Les lèvres s’entrouvrent, et une langue s’allonge, s’étire, parcourt les lèvres inexistantes, jusqu’à pendre lamentablement, Gobelin l’agite, la remonte, jusqu’à toucher, le bout de son nez, il louche et s’amuse.

Babel, la Cité des promesses. La muse, qui anime tous les esprits artistes, l’espoir, d’un avenir meilleur, d’une union entre les peuples, d’une Cité où l’Ordre et l’Harmonie règnent, une Cité où Gobelin s’interroge. A-t-il sa place ici ? Laisse-t-on vagabonder les vilains, les chaotiques et les mercenaires, les êtres qui vivent de la guerre ? Gobelin voit, en bas, les armes qui s’affichent aux tailles, le vol désespéré d’une maigre femme, les regards mauvais qui s’échangent, les rictus moqueurs, adressés à un homme de passage.

Gobelin pousse un croassement, un son qui vient du tréfond de son être et fait racler sa gorge, témoin de sa déception et de sa frustration. Gobelin penche la tête, jusqu’à ce qu’une silhouette familière, lui fasse écarquiller les yeux. Alors, le diable surgit de sa boîte. Son corps se détend, les longues jambes, se déplient, les bras se lèvent, Gobelin bondit, saisit dans un rire caquetant, le bord de la gouttière, se laisse choir sur le balcon d’en bas, en équilibre précaire sur ses getas. Il bat des bras, bascule dans le vide, se rattrape in extremis, agite les jambes, se balance et retombe finalement sur les fesses, dans un couinement de douleur. Gobelin masse ses reins, il ramasse la lance qu’il a laissée là. Sa main plonge dans la poche de son kimono d’un vert sombre et déplie, avec expérience, la lanterne de papier.

Il l’accroche à l’extrémité de sa lance et s’élance, dans un nouvel éclat de rire, un son perçant, qui attire les regards des passants. Surpris, on tourne les yeux, assiste à la course effrénée, d’un Gobelin effrayant.
Son pas n’est plus seulement sautillant, il bondit, d’une geta sur l’autre, le manque d’équilibre lui sert d’élan et parfois, voilà qu’il s’appuie sur sa lance, pour jaillir vers l’avant. Le vent balaie son visage, ses cheveux noirs dévoilent un rictus carnassier, la langue au vent, les yeux embrasés, d’un feu lugubre.

_ Poussin ! Poussin !

Glapit Gobelin, les bras levés vers le ciel, sa main se lève. Sa main aux longs, très longs doigts, terminés de griffes acérées, s’agite pour attirer l’attention du jeune homme qu’il appelle. Sa voix fait grimacer, cette voix criarde rompue de gloussements, jusqu’à ce que Gobelin parvienne enfin à rejoindre la personne qu’il poursuit.
Il s’arrête à un mètre, s’appuie sur sa lance, de tout son poids. Haletant, il reprend son souffle. Accrochée à sa lance, la lanterne tournoie à deux reprises, avant de s’arrêter dans un grincement sinistre. Gobelin s’agenouille, Gobelin rit, d’une joie simple et infantile, il lève les yeux vers le ciel, puis vers lui, sa tête reposée sur la hampe de sa lance.

_ Gobelin n’aurait  jamais crû te trouver là Poussin ! Comment vas-tu ? Manges-tu à ta faim ?

Gobelin se lève d’un bond, s’approche de l’enfant, le dévisage avec attention. Tendrement, sa main effleure timidement la sienne, y glissant subtilement, un petit objet qu’il lui a trouvé. Une simple statuette en bois, qu’il a gravée pour lui, qu’il a peint pour lui, elle représente une grue délicate, à la tête penchée, perchée sur une seule de ses pattes, les ailes repliées contre elle. L’allure est noble, distinguée, maîtrisée, malgré la finesse de l’ouvrage, se devine la puissance de l’animal. Prêt à s’envoler à tout instant.

Gobelin a toujours voulu à ce qu’il ait de quoi s’amuser. Lui gravant dans le bois, différents animaux avec lesquels jouer. Et bien qu’ils se soient séparés depuis des années à présent, il a toujours dans sa poche, un petit cadeau à lui offrir.

_ Gobelin est si heureux de te voir, mon garçon, mon Poussin, si heureux, si heureux ! Couine-t-il joyeusement, les yeux brillants, Et il a tant d’histoires à te raconter. Mais avant toutes choses, il est là pour t’écouter. As-tu du temps à accorder au vieux Gobelin ? Nous pourrions aller nous sustenter et nous conter oh ! Oh toutes ces nouvelles choses que nous avons vues, vécues, goûtées, partagées, rêvées ! Rêvées, et l’un de ses rêves, s’est réalisé ce soir, te revoir ! La Cité de Babel est décidément des plus extraordinaires, nous venons d’assister à la réalisation de mes prières !

Gobelin, pour l’occasion, esquisse un pas de danse, un petit tour sur lui-même, une courbette élégante, il lui confie son bras.

_ Un humble serviteur peut-il vous escorter, jusqu’au lieu où nous aurons décidé de nous poser ?

Minaude-t-il, avec malice, levant ses prunelles vers lui. Derrière l’apparence effrayante et mystérieuse, se cache un frère, un parent, une famille. Bien que Zeng Min n’ait eu ni père ni mère, il sait que ce qui le lie à cet enfant, est une affection sincère, sans faille, un amour pour ce qu’il est, et le bonheur de le voir grandir.

Combien même s’inquiète-t-il parfois, de tout ce qu’il n’a pas réussi à lui offrir.

Il espère qu’au moins, il a su lui apprendre le plus important.  

Qu’il a su lui faire comprendre, la valeur de son existence, et tout l’amour qu’il lui vouait.

La joie fait gazouiller le Gobelin.

Ricanements et borborygmes, ébranlent les épaules et la cage thoracique. Les sons discordants retentissent contre le larynx et le palais, le masque mortuaire brisé d’un rictus carnassier, la vie luit, derrière les prunelles d’un vert vaseux. Gobelin perçoit-il le trouble, dans les mouvements de son poussin ? A-t-il compris, lorsqu’il l’a vu s’enfuir ? Et pourtant, il l’a suivi, avec ses caquètements et son pas bondissant, il a surgi, comme un diable hors de sa boîte, sans craindre la lame qui aurait pu le transpercer de part en part.

Négligence, inconscience, confiance, à moins que ce ne soit, tout cela à la fois. Car Gobelin ne connaît que trop bien la peur qu’il inspire, hideux, hideux et vilain, crachaient les villageois, face à l’enfant difforme qu’il était. Les pierres et les coups de balai auraient pu rompre en deux son dos ou son peu d’ego, mais Gobelin a su faire de son allure, une source de rires. Le ridicule pour dissimuler les blessures, transformer la crainte en stupeur et curiosité, déranger pour mieux amuser. Alors peut-être est-ce pour cela qu’il continue son cirque, malgré les sourcils froncés, la main levée vers la dague, la rapidité du mouvement lorsqu’il lui a fait volte-face.

Gobelin sait qu’il risque toujours de prendre un mauvais coup, ce n’est la faute de personne, seulement de sa bêtise, de son impatience, de cet amour débordant, car ses manières trahissent toute l’affection qui dégouline. Il retient ses caresses, l’envie d’embrasser sa peau, de le serrer contre lui, de danser avec lui ! De l’hisser sur ses épaules, comme lorsqu’il était enfant, tout ça, il ne faut pas le faire, même si ça fait envie.

Gobelin, son nom, son titre, son prénom est un secret qu’il n’a confié que quelques fois à Bai. La première fois, c’était un soir, alors qu’il veillait sur lui, Bai était malade. Il se reposait sous sa tente et Gobelin était à son chevet. L’homme, à l’abri des regards, dévoilait son vrai visage. Il n’y avait plus de sons étranges, non, seulement sa voix grave et posée, ses gestes étaient maîtrisés. Sa main glissant dans ses cheveux, épongeant son front, ses yeux le détaillant, un sourire doux, apaisant enfin les traits émaciés, il lui avait donné son nom, Zeng Min, un nom qu’il s’était choisi. Une histoire qu’il lui racontait, pour lui permettre d’oublier le mal qui lui rongeait le corps, la fièvre qui tapait ses tempes. Ce nom, il lui avait redit alors qu’ils lisaient un jour ensemble, entourés d’une couverture qu’ils partageaient. Ce nom, il aime entendre Bai le dire, car lui, il sait, il a vu, il connaît l’humain sous le masque du Gobelin.

Quand Bai accepte de lui confier ses mains, les très longs doigts du Gobelin les entourent précieusement. Ses pouces caressent sa peau, il raffermit leur étreinte, il cherche de nouvelles cicatrices, des os saillants, des tremblements, il veut s’assurer qu’il aille bien. Jusqu’à glisser dans sa paume, ce qu’il a pris soin de tailler, de peindre et de vernir, ces derniers mois. C’est pour lui qu’il l’a fait ! Pour lui, comme toutes les autres statuettes qu’il s’est amusé à lui fabriquer.

Il a commencé peu de temps après que Bai les ait rejoins. Il voulait qu’il ait un jouet, pour s’amuser avec les autres orphelins. Alors Zeng Min a pris le temps de lui faire un superbe corbeau en bois, et c’est avec ses propres teintures, celles qu’il réservait pour ses paupières, qu’il a peint l’oiseau. Peignant ses plumes de nuit, les ponctuant d’étoiles, Bai n’avait qu’à tirer une cordelette pour que l’animal batte des ailes.  

_ Je sais que tu aimes les oiseaux. Je suis content qu’il te plaise. Quel animal préfères-tu à présent ? Est-ce que cela a changé, avec le temps ?

Gobelin sent tout son être fondre, quand le masque se soulève et qu’il effleure du regard, un sourire éphémère. Ses sourires sont rares, discrets, ce sont des flocons de neige, qu’il prend le temps d’observer. Ils fondent si aisément, emportés par la chaleur d’un monde aride, d’un monde brûlant, de braises que Gobelin voit parfois brûler au fond de ses prunelles. Ils n’en ont jamais vraiment parlé, de cette froideur qui luit, au fond de ses pupilles.

Quand Bai saisit docilement son bras, Gobelin s’amuse doucement à le faire tourner, comme une valse, une danse, invitant à la légèreté de l’instant. Puis ils se relâchent et Gobelin marche paisiblement à ses côtés. Une main se glisse dans la poche ventrale de son kimono, l’autre tient sa lance, alors qu’il lève les yeux pour observer la route devant eux.

_ Allons, allons ! Gobelin n’est pas pressé, car le temps passé aux côtés de Bai n’est du temps ni perdu ni gaspillé, c’est un temps qu’il faut prendre de savourer, un présent, dont Gobelin veut profiter. Où as-tu voyagé, Bai ? Qu’as-tu vu de beau, as-tu goûté à des choses que tu as aimées ?

Il cligne des paupières et protecteur, laisse son épaule effleurer la sienne. Ses yeux verts, serpentins, se faufilent au travers du masque, à la recherche des prunelles de son protégé. Ses lèvres dévoilent ses dents, sa langue s’en extirpe, pend légèrement, comme une grimace, faire peur aux peurs, de quoi les chasser, le vilain Gobelin, c’est ce qu’il dit aux enfants, pour les rassurer. Si vilain ! Que les cauchemars font demi tour, que les ennemis s’enfuient !

_ Une cible facile ? Ha !

Un rire bref franchit ses lèvres, elles se redressent comme des babines, rictus carnassier. Les yeux plissés, la mimique mêle malice et cruauté, dissimulent son cœur serré, face à l’afflux des souvenirs, et ses prunelles glissent vers la dague à la hanche de Bai.

_ Tu sais te défendre. Ils seraient sots de t’attaquer ! Et pourquoi ? Quel mal voudrait-on à Poussin ? T’es-tu fait des ennemis ?

Préoccupé, ses yeux reviennent vers ceux du jeune homme. Et sa tête glisse, sur le côté, se penche, vers l’épaule de Bai, pour reprendre.

_ Tu peux revenir avec nous, tu sais ? Voyager avec nous ! Si tu ne te sens pas sûr. Gobelin veillera sur toi. Gobelin sera toujours ta famille. Gobelin a promis de te protéger.

Et il lui sourit.

_ Tu le sais ?

Demande-t-il, et il lève la main, tend l’index, c’est une promesse.

_ Est-ce que tu te souviens ? De ce qu’on fait aux doutes, aux peurs, de tous ces cauchemars que l’on a chassés ? Ces armes, tu les possèdes, et comme toujours, Gobelin sera ton allié !  

Car Gobelin fait le naïf et l’innocent, Gobelin fait le gamin, mais il sait mieux que personne le mal que peut faire l’humanité. Son corps porte les traces de l’intolérance, son cœur marqué à jamais par le mépris et le rejet, au point où toujours, il se cache. Derrière un sourire, des cabrioles, des grimaces. Préférant que l’on ait une raison, pour rire et se moquer, car c’est une manière comme une autre, de se rapprocher et de partager.

Car si l’un est le loup dans la bergerie, l’autre est l’étoile d’une nuit.

Le rire de Bai, le fait rire en réponse, heureux, il le fait aller et venir, voltiger jusqu’à le remettre bien droit sur ses pieds, le guider sur quelques pas, garder sa main dans la sienne, puis son bras contre le sien.

_ Qu’est-ce que tu aimes, dans les oiseaux ?

Roucoule Gobelin, marchant toujours, à pas sautillant, virevoltant, il est toujours en continuel mouvement. Girouette portée par les vents capricieux, de ses pensées qui vont dans tous les sens, et plus encore, de son cœur emporté, par tant d’émotions. La vie qui pulse, dans ses veines et ses chairs, cette fois, il n’y a plus la mort pour la voiler, plus la mort pour le freiner, il se sent, vivant, les mains s’ouvrent et s’élèvent, caressent la brise alors qu’il lâche un soupir. L’air qui franchit ses lèvres, la liberté d’être sans avoir à s’inquiéter, d’être ce qu’il est.

_ Libre ? Ah ! Gobelin est libre, bien qu’il n’ait, ni ailes ni plumes ! Qu’entends-tu, par liberté ?

Il demande, passant devant lui d’un bond pour marcher à reculons, les mains jointes dans le dos, le visage déchiré, de part et d’autre, d’un rictus qui relie, les deux oreilles. Dents aiguisées, cruauté insinueuse, dissimulant en réalité, la sincère et bienveillante curiosité.

_ Il y a une liberté, que toi et moi possédons !

Il lève un index.

_ Nous sommes ! Non pas êtres d’ailes, mais êtres, de pensées ! Nos libertés, sont celles de nos esprits capables de s’évader. Combien même ne puis-je voler, peut-être pouvons-nous nous voir, voler ! Les paysages défiler sous nos yeux, les arbres chatouiller nos ventres ! Et il y a aussi, la liberté, de décider, d’agir, le résultat, ne dépend pas de nous, mais nous pouvons faire en sorte, d’agir selon nos valeurs. La liberté, n’est peut-être pas l’absence de contraintes ou de limites, mais celle, de choisir, nos actes.

Sa main se glisse dans son dos, son sourire, s’efface, les yeux s’élèvent vers le ciel, les prunelles, se voilent. La main, joue avec une mèche de cheveu, qu’il entoure autour de son doigt, produisant, petits sons de gorges, onomatopées gazouillantes. Se balançant d’un pied sur l’autre, il rabaisse finalement la main.

_ Gobelin est libre, de se voir beau ! Que les autres le pensent ou osent prétendre le contraire, tant pis, aujourd’hui, il a décidé qu’il le sera ! La liberté de l’esprit, est celle que l’on ne peut pas arracher, alors que les ailes, peuvent être coupées. Gobelin peut-il aider, à ce que son poussin se sente… plus libre ?

Reprend-t-il, sincèrement inquiet. Car l’homme, voit l’enfant comme son fils. Car l’homme, se sent attristé lorsqu’il le sent, insatisfait, lorsqu’il le voit, blessé. Il aimerait tant, lui partager tout cet espoir qu’il arrive à se créer. Car Gobelin, a beau avoir été brisé par le monde, il garde encore l’espoir, d’un avenir meilleur. Il croit, aux bonnes rencontres, et à la profonde bienveillance, au sein de l’humanité.

_ Voudras-tu, que Gobelin te conte ses voyages ? Si tes pieds ne partent pas, ton esprit le suivra ! Après tout, tu l’as toujours accompagné, il ne se passe pas un jour, sans que ses pensées ne s’égarent vers ses poussins. Tu as été, le tout premier ! Le premier à marcher à ses côtés et jamais en sa mémoire, tu ne seras effacé, tu es, Bai.

Le nom, qu’ils lui ont donné, cette existence qui s’est enfin, incarnée ; il n’était plus, ce garçon qu’on oubliait, cette poussière qu’on balayait, il était, il est, Bai Min, enfant de cœur, d’un peu connu, Zeng Min. Noms issus, d’une œuvre presque disparue, mais que Gobelin gardait encore précieusement, dans un sac toujours à ses côtés.

_ Gobelin est allé jusqu’aux terres de Babel, dans une grande cité aux très haut murs, avec des rues si longues, qu’il faut peut-être bien quelques jours pour les remonter. Il y a goûté là-bas, un cidre très bon, aux bulles légères, goût sucré, amer sur la fin, comme un, dernier baiser. Tartes aux prunes, à la pâte molle, aux fruits lourds et épais, couverts d’un sucre, qui croustille, le jus qui imprègne les papilles. Une rivière, celle aux Milles Eaux qu’on l’appelle, ruisselle d’éclats, allant du bleu le plus profond au blanc de l’écume, là-bas y nagent, truites au ventre arc-en-ciel. Le soupir du vent, au travers de l’herbe, bruissements d’une nature, qui s’éveille et s’étire, qui se repose avant, la venue de l’hiver, l’humidité imprégnée dans l’air. Les arbres aux branches, qui grincent et qui soupirent, sous les dernières chaleurs d’un été, qui s’en va déjà, le givre qui commence tout juste, à couvrir l’herbe de diamants, diamants qui croustillent, sous les chausses et qui bordent, les cils. Voir le monde, au travers de ce prisme, lumière fendue, en tant de couleurs, il est si bon, de vivre ! De retrouver, la chaleur des fourrures et les crépitements du bois, les histoires près du feu.

Raconte Gobelin. Pas de gestes, non, sa voix suffit à porter, toutes les émotions qu’il veut exprimer, les sensations qu’il veut lui donner.

Le son de sa déglutition, la nervosité, n’échappent pas au Gobelin. Prédateur et charognard, la moindre faiblesse, ne lui échappe pas et d’ailleurs, il bondit, ses mains, se referment sur celles de Bai, emprisonnent précieusement, recueillent tendrement, ses doutes, comme pour mieux les étouffer, comme pour mieux, l’apaiser, Gobelin lui sourit, de toutes ses dents aiguisées, avec cette impudence dans les yeux, d’un cœur qui aime sans compter, sans juger, les vices et les mauvaises actions, sans punir, les bêtises, il aime, comme les parents devraient aimer.

_ Bai… L’erreur est humaine, l’Homme est foncièrement, imparfait. Défauts et qualités, bonnes et mauvaises actions, sont inhérentes mêmes, à notre nature. J’aime, tout ce que tu es, tu seras toujours le bienvenu, avec tes blessures, ce que tu considères « mauvais » et ce qui est « bon » en toi… Bon, mauvais, ah ! Aux yeux de Gobelin, tout cela n’existe pas ! Les gens agissent, pour ce qu’ils pensent être le mieux, font parfois, des actes que d’autres considèrent mauvais ou repréhensibles mais Gobelin, ne fait pas partie de ces êtres là… Pourquoi penses-tu, être mauvais ? Gobelin ne pense rien de cela et à dire vrai, ne s’interroge pas tant : il te voit, comme Bai et t’aime, comme tu es. Gobelin, ne jugera jamais : il sait que tu fais, ce qui te semble juste, ce qui te semble, important, et ce qui compte pour toi, compte pour moi.

Un index se pointe vers le ciel.

Elan d'une idée soudaine, ou bien, simplement pour attirer l'attention, non pas des autres, mais de lui ou de la Déesse. Sous les paupières mi-closes, yeux verts étincellent, entre les babines, émerge la pointe malicieuse d'une langue taquine.

_ Mon poussin, sais-tu, qu'il n'y a rien de plus libre que l'esprit ?

L'index s'abaisse jusqu'à son propre front. Ses yeux se ferment alors qu'il tapote à deux reprises sa peau.

_ Personne ne peut emprisonner, cette liberté là ! L'on peut briser mes membres ou m'enchainer à une pierre, me balancer dans une cellule ou m'enterrer vivant, mes pensées iront toujours, là où Gobelin le désire ! Au plus haut du firmament, dans l'intimité d'un boudoir ou sous les vêtements, rien ne contraint sa folle imagination, de s'emballer ! Combien d'histoires a-t-il inventé, combien de rôles a-t-il joués ? On le dit, pauvre et misérable, impuissant et méprisable, mais Gobelin s'est vu, Héros au fond de lui, se trouve, un Être… Divinement beau.

Murmure-t-il, presque rêveusement, en abaissant la main. Bai est probablement le seul à connaître ce pseudonyme, Zeng Min, et son histoire. Un prophète, tiré d'un roman fleuve, un personnage haut en couleurs, charismatique, sage et prévoyant, un homme vanté pour sa beauté et son intelligence, un modèle pour Gobelin. Au point de faire de lui, une part de son identité.

_ Tu es mon petit oiseau, Bai.

Roucoule finalement Gobelin, enlaçant son bras pour reposer sa tête contre son épaule. Car dans son esprit, Gobelin se sent tout loisir d'être ! Monstre ou humain, faible ou puissant, vulnérable ou imbattable, c'est dans son imagination qu'il a trouvé refuge loin du monde. Cette même imagination, qui a fait ces masques qu'il enfile, ce rôle d'un vulgaire bouffon.

La réponse de Bai, en réalité, suscite plus d'inquiétudes que d'apaisement. Clignant légèrement des paupières face à son manque d'enthousiasme, Gobelin reste un instant silencieux, caresse son bras du bout de ses doigts griffus.

_ J'ai conscience que le monde est terrible.

Murmure finalement Gobelin en baissant les paupières.

_ Les concepts de bien, de mal, m'échappent et ne m'intéressent pas.

Il avoue, avec sérieux cette fois.

_ Comme si le monde, était dichotomique. C'est une croyance qui soulage bien des esprits, mais qui ne retranscrit pas la réalité. Il y a tant de choses que j'exècre, l'injustice, la violence, le mépris, le jugement que certain.es exercent… Des comportements me dérangent, pour autant, les personnes qui les mènent, le sont elles vraiment ? Tout est une question, de sa conscience, plus que le regard des autres à mes yeux. Je ne me considérerais jamais juge : car j'agis d'une manière qui serait condamnée par d'autres, glorifiées par d'autres, mais j'agis, selon mes valeurs, selon ce que je souhaite faire de mon existence. Il y a tant e choses, qu'il ne m'est pas possible de vivre ou d'avoir, alors je m'imagine ! Les vivre et cela me soulage.

Gobelin marque un silence.

_ Bai… Si cette conscience, du bien ou du mal, te fait souffrir… Tu peux m'en parler, tu sais ? Gobelin sera là pour toi, toujours là pour toi, il ne sera jamais, jamais juge.

Il sourit, avec toute cette bienveillance dont il est capable.

_ S'il y a des choses que tu regrettes, il y a toujours possibilité de racheter sa faute. Des remords ? Peut-être est-il possible de trouver de nouvelles opportunités. Il arrive parfois, que l'on change de chemin en cours de marche, c'est simplement découvrir de nouveaux horizons, se chercher, chercher un sens, à son existence.

Songe Gobelin en regardant le ciel de nouveau. Comme si le vol des oiseaux, serait un augure. Une réponse à leurs questions. Un geste, de la Déesse, à leur encontre. Sourire s'éternise sur les lèvres fines, ses yeux ne quittent plus les astres, les étoiles dont il devine la lueur.

_ … Pour nous, c'est si difficile. Car nombre de nos chemins sont barrés. Ce n'est pas grave. J'essaye d'en trouver d'autres, qui conviennent mieux à mes petits bonds de Gobelin. Il est un peu cabossé, mais j'y fais toujours de très bonnes rencontres !

D'ailleurs, les compliments du jeune homme le surprennent. Touché, il en prend quelques rougeurs. Un peu de couleur, sur son teint si morbide. Un peu de vie. Emu, Gobelin accepte pour l'une des rares fois, cette affirmation si tranquille : sourit avec reconnaissance, essuie l'humidité qui borde ses cils.

_ Merci, Bai.

Heureux d'être beau, aux yeux de quelqu'un ; et de sa part, il le croit, sans douter, un seul instant, sans se dire, qu'il dit cela par politesse, par inconscience, par bonne conscience. Il le dit, car il le pense.

_ Bien sûr que je t'y emmènerai. Et je crois que je t'y conduis déjà un peu ! Par mes histoires, et parce que tu es toujours, au fond de mon âme ! Tes pas accompagnent les miens. Ton souvenir en moi, mes prières pour toi ! Toujours petit poussin, a son nid au fond de mes entrailles.

Entendre qualifier son acte de stupide, le fait franchement rire, bien qu'il finisse par gratter sa joue d'un index crochu. Il est habitué à ce que l'on trouve sa bienveillance exagérée. Sa bonté, souvent vue comme d'une affligeante stupidité, l'on s'exaspère de voir que la créature veille tant à accorder de secondes chances, s'amuse de voir qu'en tant que mercenaire, il rechigne tant à tuer. Dans cette époque implacable, cette compassion est rabaissée à n'être qu'une faiblesse d'âme, qu'accepter à ce que le mal soit réitéré. Mais Gobelin connaît la cruauté de ce monde. Combien sont ils morts, pour leurs différences ? Gobelin se refuse les rôles de bourreau et de juge, il ne veut pas de ces responsabilités sur les épaules. II sait, que sa propre survie n'est due qu'à la chance ou à la compassion d'autres, il croit en l'humanité, il a l'espoir d'un monde meilleur. Où le pardon offre l'occasion de se racheter et de corriger ses erreurs.

Mais parfois, souvent, les Hommes ne savent pas se saisir de cette occasion.

Certains continuent à oeuvrer pour le mal. Pour répandre, le mal et la souffrance. Cet incident, Gobelin s'en souvient encore, de cet homme qui s'était redressé pour le transpercer. Si Bai n'avait pas agi, Gobelin aurait probablement été tué sur le coup, ou s'en serait sorti avec de graves blessures. Les yeux à présent dénués de lumière, l'expression assombrie, il est, comme éteint, avec sa tête qui dodeline faiblement. Ses prunelles qui se sont baissées, les épaules qui se sont voûtées.

_ Ils n'ont pas eu peur de toi… Ils ont eu peur de la mort, Bai.

Sa voix est grave. Solennelle cette fois.

_ Personne ne s'habitue à l'idée que sa vie ne tient qu'à un fil. Qu'il est si facile, de la perdre, et pourtant, il est parfois si long de l'arracher. Les combats qui s'éternisent, la souffrance, l'agonie, jusqu'au dernier râle… Il n'y a rien de plaisant, à ce spectacle.

Il marque un silence.

_ Mais je suis désolé… Que tu aies vécu ce rejet de leur part. J'aurais dû dire, faire quelque chose…! Je veux que les Lanternes Vertes soient un refuge, pour toutes les personnes qui n'ont rien. Tu as été la première personne que j'ai accueillie et je veux… je veux que cela reste ton foyer… Je t'accueillerai toujours comme l'un des nôtres et je veillerai à ce que les autres en fassent de même…

Il assure.

_ Je suis sincèrement désolé, que tu aies vécu ça… Que… Que mes choix aient eu un tel impact sur toi… Tu as agi pour me protéger, et je ne t'en remercierai jamais assez… Mais je… Ne te sacrifie pas, pour ce modeste Gobelin. Bai, tu as de la valeur, tu es important, tu as tant de choses à vivre et à donner ! Ne t'en fais pas pour Gobelin, il en faut beaucoup pour en venir à bout, pour réellement, lui faire du mal !

Il sourit, un peu théâtral.

_ Les blessures de la chair finissent par se résorber, et celles de l'âme s'apaisent face à ton bonheur, rien qu'en pensant à toi et à toutes ces personnes pour lesquelles Gobelin se bat !

Assure-t-il, posant une main sur son torse.

_ Et ta vie compte beaucoup à ses yeux. Gobelin ne souhaite pas, à ce que tu sacrifies tant pour lui… S'il t'a aidé, c'est pour que tu vives, pour toi, c'est pour te rendre tout ce qu'on a voulu te prendre : liberté, refuge, sécurité, amour, famille ! Non pas pour que tu lui doives quelque chose, non, non tu ne dois rien à Gobelin, il est heureux de ce qu'il a fait pour toi et n'attend pas, à ce que tu sacrifies tout pour lui…

Assure-t-il en le couvant du regard.

_ Tu es mon poussin. Et je pensais que tu t'étais envolé de tes propres ailes ! Je suis… Je suis vraiment désolé, qu'ils t'aient poussé en dehors du nid, je leur demanderai, excuses, à ceux qui sont restés… Ce ne doit pas être impuni. Mes bras te seront toujours ouverts, et mon coeur, tu y es déjà ! Je te l'ai dit, je ne serais jamais juge : j'ai conscience, que toustes agissent selon leurs valeurs, avec des comportements différents, différents par notre histoire, notre tempérament, nos capacités… Tu n'es ni bon, ni mauvais, Bai, tu agis pour ce qui te semble juste, avec les moyens dont tu disposes. Et je sais, que tu as toujours voulu me protéger.

Il sourit.

_ Comme moi, j'aime ce que tu es. Ca ne s'explique pas ! Car c'est ça, l'amour d'un vrai parent : aimer, éperdument.

Malgré le sang sur ses mains.

Bien que Gobelin n'ait pas conscience, de tout ce que Bai a fait et fera.

_ … Mais tu as raison. On ne peut pas sauver tout le monde, comme tout le monde, ne souhaite pas une rédemption. Ce n'est pas grave… Je me dis, que j'ai laissé une chance, que j'ai laissé, un espoir. Et je crois que c'est ce qui m'importe. Me dire que j'ai tendu la main, à toustes celleux que j'ai croisés.

Il murmure en haussant les épaules.

_ J'ai conscience que ma survie, a longtemps été due à des actes isolés de sympathie, de bienveillance, de pitié, de compassion. A des occasions que j'ai saisies. Je veux rendre, ce que l'on m'a donné. Mais je sais que certaines personnes, ne se saisissent pas de cette chance… Et dans ces cas là… Je reconnais que je ne sais pas toujours comment réagir. Se protéger, me semble évident. Mais la manière, ne l'est pas tant.

Comment changer le monde ?

L’Histoire est écrite par les plus Grands. C'est sous leurs pinceaux et dans le sang de leur peuple, que se peint le Monde. Artistes capricieux, dont les visions s'opposent, en guerres fratricides, ou se susperposent en union factice. D'un geste, ils effacent les différences, écrasent les existences, sans réaliser que ces pigments viennent de toutes ces vies qui s'efforcent de survivre, sur ces grandes toiles.

Combien, aimeraient donc brûler ces grandes toiles, les réduire en cendres, que les Puissants n'aient plus à imposer leur vision, à leur faire endurer, leurs actions ?

Mais est-ce si juste ? Les premières personnes, qui l'ont affublé de ce masque monstrueux, ne sont ni Empereur ni Duc, ce sont, des gens du peuple, c'est sa propre ma-mie. C'est peut-être au sein même des encres et des peintures, qu'il faut changer les pigments. Qu'ils ne soient plus teintés de haine et de rejet mais d'amour et de tolérance, d'acceptance et de bienveillance.

Alors Gobelin dédie sa vie, à semer joie et acceptance, espérant qu'un jour, il les verra fleurir sur le monde : qu'un jour, il changera. Mais il faut plus d'un petit Gobelin, et il faut peut-être bien plus d'une vie. Peut-être est-ce même un combat continuel, contre la nature humaine ; qu'il n'y aura jamais de changements. Que ce monde est fait, pour aller et venir, la réalité changée, selon les regards et les évènements, un flot inconstant, sans qu'aucune évolution ne soit suffisante et définitive.

Mais ce point de vue défaitiste, Gobelin ne préfère pas le partager et tente même de l'oublier.

_ … Gobelin ne sait pas comment changer le Monde. Et n'y parviendra probablement pas. Pas seul, en tous cas.

Qu'il souffle, un sourire étirant faiblement ses babines. Sourire, qui s'étire davantage, quand ses yeux se tournent vers Bai. La créature lève un index et l'appuie malicieusement sur la joue du jeune homme.

_ Mais il change celui, de quelques personnes. Et cela, est peut-être suffisant. Assez satisfaisant, pour un petit Gobelin.

Pouffe-t-il tendrement.

_ Gobelin te comprend. C'est une belle voie, que tu as choisie. T'y épanouis-tu ? Trouves-tu ce que tu y cherches ?

Qu'il demande, avec curiosité. A l'explication de Bai, Gobelin cligne des paupières et reste un instant silencieux. Ses yeux se détournent, vaincu, il baisse la tête dans une onomatopée plaintive, jusqu'à entourer franchement le bras de Bai des siens.

_ Tu as raison. C'est ton choix. Gobelin doit le respecter. Tu as été courageux. Et Gobelin t'est reconnaissant de l'avoir sauvé… Je…

Sa voix hésite. Tout ce qu'il pourrait faire… Pour lui ? Il en reste sans voix. Avant de baisser la tête, laisser ses cheveux retomber devant ses yeux. Une main se lève et gratte l'intérieur de son cou de ses griffes acérées jusqu'à y rester un instant.

_… Je ne te verrai jamais comme un monstre. Tu es… le poussin que j'ai trouvé. Un petit garçon, à qui le Monde a tenté d'arracher les ailes. Je suis heureux de savoir que le temps, notre rencontre, ont permis de les soigner, assez pour que tu voles de tes propres ailes. Je sais… Que tu te bats pour des causes importantes. Tu n'as pas à être comme moi. Je ne suis pas un exemple. Dans ce monde implacable, peut-être vaut–il mieux avoir bonne mémoire… L'on dit d'ailleurs que les corbeaux sont des oiseaux capables de se souvenir, de ceux qui les ont aidés et de ceux qui leur ont fait du mal…

Qu'il songe en levant à son tour les yeux vers le ciel. Jusqu'à l'étreinte. Décontenancé, Gobelin se tend instinctivement : sous le vêtement, il reste toujours, maigre, émacié, le dos légèrement bossu, la tête rentrée dans les épaules osseuses. Et ses mots, comme une peinture au couteau, étalent une douceur franche et percutante, ravive, les couleurs oubliées. Celles des peines pas si passées, des espoirs piétinés.

Les yeux verts, se mouillent. En silence, ses mains s’élèvent, empoignent tendrement les épaules du jeune homme. Il se réfugie dans ses bras et laisse finalement l’une de ses mains, descendre le long de son dos, sa tête se reposant contre la sienne.

_ Tu me donnes tellement, tu sais. Voir où tu en es aujourd’hui, voir que tu es en bonne santé… Que tu m’invites chez toi…! Ca me fait tellement plaisir.

Qu’il assure, d’une voix grave, un peu tremblante, sous l’émotion.

_ J’ai… je ne suis pas à plaindre… J’ai de quoi me nourrir, et surtout, maintenant, je suis bien entouré. De gens comme toi.

Qu’il sourit.

_ Tu as a été le premier à cheminer à mes côtés… A accepter ma compagnie… Et à chaque fois que l’on se voit, je suis bien accueilli, quelque soit mon état. Tu es ma famille.

Il se détache légèrement et pose une main sur son épaule, le couvent du regard.

_ Je suis fier de toi. Et j’ai conscience que grandir… dans ce monde, quand l’on est différent, ne laisse pas sans blessures, sans séquelles…Ne t’efforce pas d’être comme moi : sois toi. Ce que je suis, n’est pas forcément “bien”, n’est pas forcément un modèle, c’est simplement ma manière de survivre, comme toi, tu as la tienne. Qui suis-je, pour juger ?

Il ricane et roule des yeux, tire la langue en louchant.

_ Juste un Gobelin !

Il éclate de rire, puis prend sa main dans la sienne.

_ Allons manger un petit quelque chose, puis ! Ton Temple est loin ? Veux-tu m’y mener ? S’il est loin d’ici, décris le moi, dis moi, où je peux le trouver !

Il s’avance en brinquebalant un peu la tête.

_ Tu es un homme sage, Bai. Tes paroles, font écho en moi et à une part en moi. Et je suis heureux, que tu puisses disposer de ta liberté. Que tu arrives à pleinement, la vivre, sans regrets. C’est une grande force. Elle aide, à avancer.

De continuer son tableau, sans avoir tout à brûler.